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Dix lunes
16 août 2009

Six ans

Je m’apprête à « l’examiner », en jargon professionnel, un TV : toucher vaginal. Pour une fois, le vocabulaire médical n’édulcore pas la réalité du geste, il s’agit bien de toucher. Cet examen  si souvent subi par les femmes n’est pas tout à fait banal.  J’attends donc qu’elle y soit prête et lui demande son autorisation.

Sa réponse fuse, trop rapide « je n’aime pas ça mais faut bien » et m’alerte… Non, « faut pas », nous pouvons faire autrement, différer, reporter …  Je le lui rappelle.

Un triste sourire insiste pour m’autoriser.

Dans son attitude, plus qu’une simple réticence.
Faute de consentement, j’attends.

Puis une toute petite phrase, presque murmurée « ça vient de mon enfance ».
Je sais déjà qu’il s’agît là plus que d’une simple appréhension…
J'enlève mon gant
Je l’écoute

Et elle pleure sur ses six ans agressés, la mémoire perdue puis revenue au travers de cauchemars, l’incrédulité des adultes, la mauvaise volonté policière, les quinze années passées à porter cela, mais tout va bien.

C’est de sa faute car elle était belle et pourtant, elle ne s’est jamais trouvée belle. Évidemment, il est bien trop dangereux d’être belle !

C’est de sa faute car elle doit payer des atrocités commises dans une vie antérieure ; comment expliquer sinon qu’on ait pu lui faire subir cela, à elle petite fille ?

C’est de sa faute mais tout va bien…

Doucement j’arrive à la convaincre qu’elle a le droit de chercher l’apaisement, que l’on peut l’y aider.
Elle acquiesce d’une inclinaison de tête.
Ce fragile accord est précieux.

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Commentaires
A
C'est vraiment un beau métier que le tien. Quand je te lis, je sens les émotions et mes larmes ne sont pas loin.<br /> Comment rester insensible devant ces femmes qui ont souffert ?<br /> Merci pour l'écoute et le soutien que tu leur apportes. Si tous les médecins étaient comme toi !
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