Commère
Visite à domicile dans l'immeuble d'une vague connaissance.
Je la croise en repartant, encombrée par le pèse-bébé et la mallette portés en bandoulière, une main tenant le téléphone pour écouter le message reçu quelques minutes avant, l'autre fouillant sans succès mes poches à la recherche de mes clefs.
Ainsi empêtrée, je me démène pour appuyer sur le bouton d’ouverture de la porte, happer la poignée avant que la sécurité ne la bloque à nouveau en espérant me faufiler dehors.
Trop tard, elle me coince !
- Bonjour ! Tu vas bien ? Mais que fais-tu ici ?
- Ben je travaille…
- Ah oui ? T'as vu qui ?
Je n’ai pas à le dire et ne réponds pas. Mais vu la proportion de troisième âge dans l’immeuble, doit pas y avoir beaucoup de possibilités.
- Ah oui, que je suis bête, ma voisine du dessus… elle vient d’avoir un bébé. Et alors, ça va bien ?
Elle me barre la route
- Oui oui, très bien…
- Elle a accouché quand ? Ca s'est bien passé ?
Je tente l'esquive humoristique
-Tu sais secret médical toutça toutça …
Peine perdue, elle poursuit
- Le père était là ?
Je cherche à m’enfuir me dégager mais elle insiste
- Tu les trouves comment ?
- Très sympa, très sympa ! Bon ben faut que j’y aille, j’ai une autre visite à faire.
- Ah oui très sympa ? Parce que dans l’immeuble, on est un peu mitigés. Ils sont arrivés récemment et…
- Bon ben j’y vais
- Oui parce qu’on leur reproche quand même….
- Je veux pas le savoir, ça ne me regarde pas !
- … de faire l’amour un peu fort !
J’ai bien tenté de parler plus haut et de clamer mon au revoir pour couvrir le son de sa voix.
J’ai entendu quand même.
Et pourquoi est-ce moi qui me retrouve honteuse de ce commérage reçu contre mon gré ?