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Dix lunes
28 avril 2012

Chronique de la haine ordinaire

 

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La maternité en attente de nouveaux locaux est vétuste. Juste deux salles de naissance et un bloc opératoire. Pas de salle de garde. Le bureau des sages-femmes se résume au dessus d'un antique chariot au blanc piqueté de rouille servant à faire les "soins". Entre deux tournées de chambre, il est remisé à côté des spéculums en métal qui trempent dans le liquide de désinfection.

Pas de néonatalogie, évidemment ; juste un incubateur, dans la seule salle de naissance disposant des branchements nécessaires.

Ladite salle est occupée par une jeune femme noire qui vient de mettre au monde son premier enfant.

Dans la couveuse, derrière elle, ce n’est pas son bébé que l’on surveille mais celui né un peu plus tôt dans la salle voisine. Il va bien.

Evidemment, il aurait été plus simple d'inverser les salles de naissance mais la nécessité de recours à la couveuse ne s'est révélée qu'à la fin de l'accouchement, bien trop tard pour déménager tout le monde.

Le papa du bébé mis en surveillance vient d'arriver. Il n'a pas assisté à la naissance et souhaite voir son enfant. Rien de plus légitime...

Dans la salle où nous surveillons son bébé, la jeune femme vient d' accoucher ; impossible de la ramener dans sa chambre tout de suite. Je viens donc lui demander l’autorisation de faire entrer le père. Elle accepte avec chaleur, s'excusant presque d'occuper les lieux.

La salle est rapidement rangée. La maman réinstallée, recouverte d'un drap. Son petit tête paisiblement. Je peux inviter l’homme à entrer.

En franchissant la porte, il jette un œil à la jeune accouchée qui l’accueille en souriant. Sans la saluer, il s’approche de la couveuse, contemple un instant son enfant puis lance de façon suffisamment distincte pour que personne dans la salle ne puisse douter des paroles prononcées  "J’espère qu’elle ne va pas déteindre sur lui ".

Je l’ai viré.


Tout rapport avec les débats actuels ne serait que pure intention.

 

©Photo

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Commentaires
G
Eh ben, moi, après ces dures semaines qui m'ont fait comprendre que je me suis plantée sur toute la ligne ... mon pays n'est pas ce que j'ai cru ... J'ai maintenant au moins un autre argument quant à ma décision d'accoucher en maison de naissance ... Au moins je connaitrais la personne et cela me garantira qu'elle ne fait pas partie des 1/5 ouvertement racistes (ou que la couleur dérange si çà peut faire plaisir à certains de ne pas voir la vérité en face)... Ben oui, je suis française blanche et mon mari est camerounais noir, je précise car au fond, une chose est sur ce n'est pas la nationalité qui dérange, c'est la couleur. Je serais camerounaise blanche qu'on s'en foutrait, mais noir ... même s'il est chercheur ... est bien c'est différent. Alors comme Julay, LA question : "Partir ?" (au Canada notamment ...) on se la pose et repose. Car oui, on vous le rappele si souvent que vous êtes différents, de la préfecture à la rue en passant par les entretiens d'embauche, rien n'est pareil ... Maintenant, après c'est longues 5 années ..., prenons les choses enfin en main, et offrons un avenir meilleur à tous ... sans discrimination stupide, basée sur l'ignorance et la peur...
A
inadmissible..ces propos..je suis persuadée que même 20 ans plus tard on pourrait entendre la même chose! et ce pauvre enfant a dû grandir avec ces idées rétrogrades et racistes!<br /> <br /> je pars d'un constat simple..quelque soit notre pays d'origine nous sommes issus de la mixité..invasions des nordiques, des romains, les USA? des emigrés à la base! venus du Royaume Uni, de l'Europe entière, de l'Afrique..de tous temps les hommes ont voyagé, émigré pour 1 vie meilleure..<br /> <br /> je pense ne pas entrer dans les cases, dans les codes de mon apparence..<br /> <br /> je suis moi-même là grâce à l'immigration..et oui la famille de mon père vient d'Italie..alors..je ne suis pas contre l'immigration..et ces histoires de bon ou mauvais étranger..c 'est 1 question d'histoire, d'éducation, de point de vue, bref c'est 1 débat qui pourrait durer..<br /> <br /> moi je me dis une chose..vue où je travaille et la "population" qui y séjourne ,ben si on arrêtait l'immigration, si on mettait dehors tous les étrangers, j'aurais moins de travail!<br /> <br /> quelles que soient les origines, les religions, la naissance c'est beau..et c'est 1 moment important, particulier dans la vie des ces personnes..ça ne devrait pas être gâché par des haines, le racisme..1 femme, 1 homme émus par la naissance de leur bébé, qu'ils soient jaunes, noirs, blancs, métis, arabes..ben moi ça m'émeut, et ça ne change pas ma prise en charge! <br /> <br /> <br /> <br /> sur la politique on pourrait en dire, personne n'est d'accord, c'est pour ça qu'il n'y a pas qu'un parti, l'avantage en France c'est la démocratie, et les élections nous permettent de nous exprimer, maintenant parler politique , ça fini toujours en dispute!<br /> <br /> bravo pr ta réaction de l'époque 10lunes!
C
Pas besoin d'être étrangère pour être stigmatisée...
A
ireBrocassine,<br /> <br /> <br /> <br /> Je rejoins Julay dans son commentaire. Même si ce sont d'autres points du programme du FN qui intéressent les personnes qui votent, celles-ci savent pertinemment bien qu'en votant FN, elles cautionnent les aspects les plus mis en avant du FN, à savoir la haine, la peur et l'exclusion des étrangers. Et c'est cela que, pour ma part, je trouve inacceptable dans ce vote. <br /> <br /> <br /> <br /> Puis, parler de racistes primaires, cela veut dire quoi?<br /> <br /> <br /> <br /> Contrairement à ce que tu penses, je crois, quant à moi, qu'un cinquième des Français est capable de dire qqch du genre: "je ne veux pas que cet enfant déteigne sur mon enfant". <br /> <br /> <br /> <br /> Etant Asiatique, j'ai essuyé assez peu de racisme, finalement, en tout cas, une fois devenue adulte. Oui, le racisme anti-"jaune" est encore soft. <br /> <br /> <br /> <br /> Par contre, pendant mes 5 ans d'étude de droit, j'avais comme amoureux un Congolais (bon, comme ça, vous en savez plus sur moi ;-). Ben, je peux vous dire que des regards peuvent en dire long. Au vu de ces regards, de ces suspicions, de ces remarques quasi QUOTIDIENNES dont j'ai été témoin, je trouve des plus admirables le calme dont certaines personnes stigmatisées font preuve tous les jours.<br /> <br /> <br /> <br /> "Si nous refusons les amalgames, refusons-les jusqu'au bout. Si le FN a recueilli autant de suffrages, c'est peut-être qu'il y a des questions à se poser de manière urgente si on ne veut pas qu'il en recueille encore plus aux élections suivantes. "<br /> <br /> <br /> <br /> Il y a des questions à se poser de manière urgente. Certainement. Mais, je ne vois pas en quoi je pose un amalgame en déclarant que les personnes qui votent FN sont ouvertement racistes. Prétendre le contraire consiste, pour moi, à faire l'autruche. Evidemment, cela ne va pas leur plaire, cette "condamnation", ce jugement de ma part. Mais, en votant FN, ne jugent-ils pas tous les étrangers (même s'ils n'en veulent qu'aux "mauvais" étrangers, comme ils oseraient le déclarer)?
A
Hello,<br /> <br /> <br /> <br /> Marietoune,<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ton témoignage. C'est intéressant de recevoir des témoignages de personnes ayant vécu la situation, mais de l'autre côté. <br /> <br /> <br /> <br /> J'ai été une enfant très exclue et marginalisée lors de toute ma scolarité, jusqu'à l'université: étrangère, enfant de classe moyenne dans des écoles élitistes à crever (j'ai ouvert des yeux gros comme ça quand j'ai appris que certains dans ma classe habitaient une maison avec piscine. Pour moi, la piscine, c'était la piscine communale, du moins, la piscine partagée pour laquelle il fallait payer une entrée). <br /> <br /> <br /> <br /> J'en ai beaucoup parlé à mon homme. Il m'a raconté comment, enfant, il avait, par bêtise, par imitation, par...?, lui-même stigmatisé et systématiquement moqué une petite fille asiatique. Il regrette et n'a réalisé sa bêtise qu'en écoutant mon histoire.<br /> <br /> <br /> <br /> Moi, dans ces moments-là, où je me replonge dans ce passé douloureux, je n'ai qu'une envie, c'est de prendre dans les bras la petite fille que j'étais. Je crois que c'est Filliozat ou l'analyse transactionnelle qui m'a soufflé cette idée d'imaginer la petite fille que j'étais et la femme que je suis devenue et de donner à l'enfant qui est en moi l'empathie et l'amour qui lui ont manqué à ce moment-là. Cette image m'aide beaucoup. Quand j'y recours, c'est souvent les yeux humides.
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