Conflit de générations
L’année débute avec une mise en accusation des pilules contraceptives. J’avais commencé une revue de presse avec analyse détaillée mais je renonce tant tout et n’importe quoi a été dit dans les médias. Inutile de s’y attarder. Par ailleurs d’autres praticiens ont déjà publié d’excellents articles très documentés (cf Martin Winckler, ou Dominique Dupagne ). Inutile de s'escrimer à le refaire en moins bien !
Je soulignerai simplement que le principal risque de l’hallali actuel est de voir de nombreuses femmes arrêter sur le champ leur comprimé quotidien brutalement promu au rang de poison mortel. Le meilleur moyen de voir exploser le nombre de grossesses non désirées et le taux d’IVG…
Mais une seconde bataille est en train de se mener plus sournoisement.
L’ANSM -Agence nationale de sécurité du médicament - a en effet émis la brillante idée de réserver la prescription des pilules de 3ème et 4ème génération aux spécialistes. Dominique Maraninchi, directeur général de l’ANSM a précisé mardi "Si notre mesure de mise en garde auprès des prescripteurs ne suffisait pas, il s'agirait de réserver les conditions de prescription et de délivrance (de ces pilules) pour en limiter l'utilisation, pour être sûrs qu'elles ne soient utilisées qu'en deuxième recours et la réserver à des spécialistes".
Cette suggestion inscrit en creux l’incompétence supposée des autres prescripteurs, principalement les généralistes mais aussi les sages-femmes.
Pourtant, un document de l’Afssaps, devenue depuis ANSM pour faire oublier son apathie dans l’affaire du médiator montre bien que ces G3 et G4 étaient majoritairement prescrites par les spécialistes. ( les sages-femmes n'apparaissent même pas dans ce document. Comme trop souvent oubliées lorsque l'on parle de suivi gynécologique... ). La "solution" évoquée par l’ANSM laisse donc plus que perplexe. D'autant que même les gynécologues semblent ne pas vouloir endosser ce rôle, "trop de responsablités" affirme le président du Syngof...
Laissons donc tout ce petit monde s'amuser à coup de déremboursement et de passage de patates chaudes.
Le bénéfice inattendu de tout ce tapage, c’est que le choix d'une contraception sera enfin réellement discuté et non plus sèchement imposé !
Et si vous doutez de votre contraception actuelle, prenez rendez-vous avec votre sage-femme, votre médecin traitant, voire votre gynécologue (je ne pratique pas l'ostracisme obtus). Le débat est ouvert !
PS : je ne résiste pas au petit plaisir de rappeler ce billet, tout à fait de circonstance bien que datant de juin 2012...
PS bis : à écouter : "Faut-il arrêter de prendre la pilule ?" sur France Culture aujourd'hui