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Dix lunes
25 août 2013

Exemplaire !

 

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Une boite photo a passé contrat avec la maternité voisine pour démarcher les jeunes parents. Même genre de société que celle évoquée dans cet article* - ou sa cousine germaine - avec les mêmes procédés et la même exploitation de jeunes photographes essayant de gagner leur pain quotidien.

Le jeu est donc d'entrer dans la chambre, en blouse blanche pour mieux se fondre dans le défilé de l'équipe de soin. Cela permet d'éviter que l'accouchée ne réagisse immédiatement. Et voilà quelques précieuses secondes gagnées qui permettent au "démarcheur-photographe" de lancer son discours : souvenirs précieux, moments inoubliables, qualité pro, n'engage à rien, photo gratuite…

Ce jour là, la jeune maman n'est pas une novice. Deux ans plus tôt, à la naissance de son ainé, elle avait accepté la séance photo. Elle garde un souvenir amer de l'assaut mené quelques semaines plus tard par une commerciale aguerrie, lors de la remise du tirage gratuit ; ledit tirage étant celui où son bébé louchait avec application...
Sur les autres, les payants, son tout-petit a belle allure. Défilent devant ses yeux album, calendrier, tapis de souris et autres mugs ornés de la bouille de son nouveau-né. Ca fera plaisir aux grands-mères !
Les tarifs sont prohibitifs, elle s'accroche à son refus. La commerciale insiste, réduit peu à peu ses prétentions. Juste quelques photos alors ? Toujours non.
Vient le temps du chantage affectif : Mais si vous ne les achetez pas, on va tout bruler ... Malgré ce que cela lui suggère d'images sinistres, elle résiste encore.
Arrive le dernier argument, le truc qui tue, surtout une jeune mère inondée d'hormones, espérant un monde beau et solidaire pour l'enfant qui vient de naitre. Mais ça fait deux heures que je suis là, si je ne vous vends rien, je vais perdre mon job !
Elle est vaincue.

Bien décidée à ne pas répéter son erreur, elle refuse la séance photo avec d'autant plus d'assurance qu'elle ne trouve pas son petit au mieux de sa beauté pour le moment.  Teint carmin, lanugo descendant bas sur le front et les oreilles, yeux encore bouffis ; il ne lui parait pas le plus beau bébé du monde.

Elle décline donc en justifiant son refus par cet argument. 

Le photographe ne se démonte pas… Mais non, il est parfait votre bébé !  Je vais vous montrer une photo de bébé moche dit-il en extirpant de son sac un tirage couleur qu'il brandit triomphalement sous son nez. Vous voyez, celui-ci est vraiment moche, pas comme le votre ! 

Elle termine son récit dans un éclat de rire, regardant tendrement son tout beau nouveau-né lové dans ses bras… Là, je me suis dit, faut vraiment pas que je le laisse faire une photo parce que sinon, ce sera mon bébé qui servira d'exemple !

 

 

*l'article était en accès libre au départ mais il est maintenant réservé aux abonnés  :(

 

 

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17 août 2013

Vacuité

 

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La fin de l'été se profile déjà. Fin de la mise en retrait ; ce presque néant est un bonheur rare. Pas tout à fait vide quand même. Penser à des femmes et familles que je retrouverai avec plaisir, me laisser hanter par des situations m'ayant mise en difficulté, tenter de récupérer le retard de lecture des publications scientifiques et professionnelles et rester bien en deçà de ce que j'avais programmé.

J’ai pris le soleil pas assez, jardiné, pas assez, nagé, lu, cuisiné, regardé, écouté, rêvé, pas assez… 

J'ai passé du temps sur le net, bien trop ; continuer la veille, suivre quelques dossiers, rester à l'écoute de la "sage-femmerie", de quelques projets. 

Certains jours, je me suis irritée de trouver mes consœurs - et d'autres soignants - frileux, aigris, mesquins, repliés sur eux-mêmes. Certains soirs, j’ai croisé des "consommateurs de soin" exigeants, irrespectueux, indifférents aux autres. 

D’autres jours, les sages-femmes - et les autres soignants- se révélaient généreux, motivés, solidaires, prêts à investir temps et énergie pour que la santé reste un bien commun. D'autres soirs, les "soignés" se montraient responsables, critiques, mobilisés, questionnant le système et portant haut de belles idées.

Le blog a eu 4 ans cette semaine. J’écris moins. A quoi bon. Que pourrais-je écrire qui vaille la peine d’être lu. A quoi sert de poser des mots sinon à me réjouir connement devant un compteur des visites.
Et puis, le commentaire ou le mail d'un inconnu font tanguer ma désillusion. De belles rencontres, de beaux échanges qui éclairent une journée.

Est il utile d’écrire sinon pour nourrir son propre ego ? Ou cet ego peut-il être un moteur bienvenu pour partager ce qui nous tient à coeur avec quelques passants du net ?

J’ai encore envie de partager, je crois.
Mais suis de moins en moins dupe.

 

 

8 août 2013

Une question de pot

 

stopwatchC'est un jour comme je ne les aime pas. Les rendez-vous s'enchaînent et le téléphone se déchaine. D'habitude, un arrangement tacite fait que chacune essaye de prendre les appels à tour de rôle pour que ce soit moins lourd. Ce jour-là, je suis seule au cabinet, aucun relai n'est possible et il semble que la ville entière se soit donné le mot.

Je passe mon temps à m'excuser de décrocher auprès des gens que je reçois, essayant de faire au plus vite. Quand l'échange s'annonce prolixe, je propose de rappeler plus tard et la liste des rappels à faire s'étirant, je me sens obligée de préciser "Surement assez tard ; après 21 heures, ça ne vous dérangera pas trop ?" La journée sera longue.

Une solution serait de brancher le répondeur mais pour cela il faudrait enregistrer l'annonce adéquate - je n'ai jamais pu trouver le Graal que serait un répondeur acceptant de garder en mémoire plusieurs annonces différentes…  Au vu du retard accumulé, je n'ose pas prendre le temps de faire le message entre deux rendez-vous, sure de bafouiller et de devoir m'y reprendre à de multiples fois.

C'est à elle. Je la prie d'excuser mon retard. Elle s'assied, la mine défaite, son bébé de deux semaines endormi dans ses bras. Elle est fatiguée, peine à trouver ses marques de jeune mère. Tout l'inquiète, il dort peu, pleure beaucoup, réclame souvent, le cordon saigne. Surtout, à la maternité, on a décelé un petit souffle "sans gravité". Cette précision ne l'a pas rassurée ; elle rumine l'information depuis la semaine dernière " Je n'ai pas voulu te déranger" … Le téléphone lui n'hésite pas. Je m'excuse à nouveau et décroche, bien décidée à reprendre l'entretien au plus vite.

A l'autre bout du fil, mon interlocutrice a quelque chose à demander à mon associée mais consent, à défaut, à m'interroger. Elle se lance dans un long monologue. "Comment faut-il s'y prendre pour mettre un enfant sur le pot parce que le petit, il veut pas y rester et pourtant il a l'âge parce que deux ans c'est l'âge quand même ma mère disait un an et ma belle-mère dix-huit mois mais je voulais pas le brusquer et ce serait quand même bien qu'il y arrive mais même en lui donnant un jouet il se relève tout de suite alors je me demande si...".  Un peu déconcertée, je tente de couper court en annonçant que je ne sais pas vraiment quoi lui répondre, que la sage-femme n'est peut-être pas le professionnel adéquat.

Elle rétorque qu'elle a appelé le cabinet parce qu'elle ne savait pas à qui s'adresser mais que mon associée elle, elle savait toujours TOUT.
Et raccroche, me laissant le poids de sa perceptible déception.




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