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Dix lunes
28 février 2013

Rebelote

 

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Cet après midi à 16 heures, la proposition de loi de Mme Dini sur l'expérimentation des maisons de naissance sera débattue au Sénat.

On va dire qu'on est contents ! Même si dans son exposé des motifs, Muguette Dini oppose MDN et accouchement à domicile "Les maisons de naissance peuvent offrir une alternative satisfaisante et sûre à ce type d'accouchement, dont on doit se prémunir contre le développement." (sic)

Ce qui apparaît contradictoire avec une précision importante donnée plus tard " Il est d'ailleurs intéressant de constater que dans les autres pays où le taux de mortalité constaté se situe entre 3,3 et 3,6 pour mille, les maisons de naissance ne sont pourtant pas accolées aux services des maternités, mais peuvent se situer jusqu'à trente minutes d'un plateau technique comme au Québec".

Après sa présentation, les sénateurs de la commission des affaires sociales la questionnent. Certains méritent le "Gérard de celui qui n'y connaît rien mais a envie de causer quand même en prenant garde à bien défendre ses copains médecins que c'est pas de pauvres sages-femmes qui vont dicter la loi".

L'impayable Allain Milon trébuche en parlant de "profession paramédicale" puis introduit une curieuse limite "Je suppose que ces structures n'accueillent pas de primipares"  pour ensuite enfoncer les portes ouvertes "elles ne pourront pratiquer les péridurales" et croit bon de préciser "Des conditions devront être observées par les sages-femmes qui tiendront les maisons de naissance".

Catherine Deroche poursuit sa défense de la gynécologie médicale "Je pense qu'il peut aussi exister une relation de confiance entre une femme et le gynécologue-obstétricien ou le gynécologue médical qui la suit pendant sa grossesse" en omettant que le suivi de la grossesse peut être assuré par une sage-femme et doit l'être dans le cas d'un accompagnement global en MDN.

Gérard Roche lève le lièvre de l'insoutenable indépendance des sages-femmes "J'aimerais qu'il soit explicitement indiqué dans le texte que les maisons de naissance doivent être non pas attenantes à une maternité, mais placées sous l'autorité médicale d'un service d'obstétrique."

Laurence Cohen réinvente l'eau chaude "Je pense qu'une expérimentation de ce type peut être menée dans un cadre sécurisé, en assurant la possibilité d'une intervention sur le plateau technique dans l'enceinte de la maternité, et avec la possibilité d'un choix des patientes."

Ce à quoi Muguette Dini lui répondra très justement "Les pouvoirs publics ont en effet tenté de développer des espaces physiologiques à l'intérieur de certaines maternités. Les résultats sont très inégaux selon les établissements.Ces espaces sont très nettement différents d'une maison de naissance : ils ne permettent pas un suivi global par une sage-femme et ne disposent pas de personnels dédiés".

Catherine Procaccia doute de la capacité de choix des femmes " N'y a-t-il pas une ambiguïté à proposer des accouchements sans péridurale dans les maisons de naissance, alors que de plus en plus de femmes en sont demandeuses ?  et omet les actions de prévention mises en oeuvre, telle la consultation d'anesthésie : Je m'interroge sur les risques liés à un éventuel changement d'avis à la dernière minute d'une parturiente, puisqu'il faut avoir vu un anesthésiste à l'avance pour qu'une péridurale puisse être pratiquée".

Marie-Thérèse Bruguière dénie aux sages-femmes toute autonomie d'exercice"(les MDN) doivent être dépendantes de l'hôpital, notamment s'agissant de la responsabilité. Et plus loin : Je voudrais souligner que dans les maternités publiques, ce sont déjà souvent les sages-femmes, et même les élèves sages-femmes, qui réalisent les accouchements - sous l'oeil vigilant des médecins".

Depuis le débat en commission, des amendements ont été déposés. Certains s'inquiètent de la prise en charge des soins, d'autres de la fermeture des maternités de proximité, beaucoup insistent sur la nécessaire sécurité. Du très politiquement correct.
Mais l'un d'eux m'a fait choisir la photo qui illustre ce billet.

En effet, Gilbert Barbier a déposé un amendement demandant  "Après le mot  sages-femmes insérer les mots et des maïeuticiens" et le justifie ainsi : Cet amendement vise à rappeler que la profession de sages-femmes n'est pas exclusivement féminine. Les hommes, appelés maïeuticiens, ont aussi vocation à exercer en maisons de naissance".

Un débat essentiel.

 

 

Edit du 01/03 : L'intégralité des débats sur les MDN au Sénat est disponible ici. Une heure trente d'échanges qui n'ont débouché sur rien parce que l'horaire était dépassé. Mme Dini devra donc réinscrire le texte à l'ordre du jour d'une autre séance. Tout ça pour obtenir une expérimentation limitée en nombre (une dizaine de sites maximum) avant un élargissement possible après 5 ans d’évaluation. 
Surtout ne pas se précipiter.

 

©Photo

 

 

 

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26 février 2013

Acharnement pas thérapeutique

 

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Certains combats judiciaires dépassent très largement la défense d'un intérêt personnel. Celui mené depuis 6 ans par Eudes Geisler est de ceux-là.

Après un premier accouchement en clinique privée qui la laisse insatisfaite, elle cherche un accompagnement différent pour son second enfant. Aucune sage-femme de sa région ne pratique les accouchements à domicile (1) et les maisons de naissance pourtant évoquées depuis 1998 sont toujours en débat (2)Par chance, elle habite en zone frontalière. Son bébé verra donc le jour dans une maison de naissance allemande.

Bien avant son accouchement, Eudes Geisler prévient sa CPAM pour obtenir une prise en charge, essuie un refus, fait un recours en adressant un courrier très argumenté qui génère pourtant un nouveau refus. Elle sollicite la commission de recours amiable sans plus de succès. Elle saisit alors le TASS (tribunal des affaires de sécurité sociale) et est encore déboutée

Pour faire bonne mesure, elle est condamnée à une amende de 100 € "pour avoir voulu faire supporter par la communauté des assurés sociaux un choix de pure convenance personnelle"...

Cet argument spécieux est d'autant moins recevable que le remboursement demandé (1046 €)  est inférieur au tarif d'un accouchement - sans séjour- dans une structure française (3).  

Eudes Geisler n'est pas femme à se laisser abattre. Elle se pourvoit en cassation. Le premier jugement est annulé et l'affaire renvoyée devant le TASS. Cette fois ci, il tranche en sa faveur et lui attribue le remboursement de ses frais d'accouchement.

 

La bataille semble gagnée ?
Pas du tout !
La CPAM fait appel de ce jugement...
...Et est à nouveau déboutée.

Happy end ?
Toujours pas !
La CPAM décidément déterminée à faire supporter le coût de son obstination par "la communauté des assurés sociaux" se pourvoit en cassation.

C'est donc reparti pour un tour et si je vous ai décrit tout cela, c'est que cette bataille juridique a un coût - déjà bien supérieur à la somme réclamée ! - et qu'il faut maintenant trouver plus de 5000 € pour payer les frais d'avocat.

Entre temps, Eudes Geisler a mis au monde un autre bébé, toujours en maison de naissance allemande.
Et devinez quoi, sa demande de prise en charge a été refusée !

 

Pour en savoir plus
Pour faire un don

 

1- le coût de l'assurance serait d'environ 20 000€, à rapprocher des 313 € versés par l'assurance maladie à une sage-femme pour l'accouchement et les soins postnatals pendant sept jours...

2- Une proposition de loi sur l'expérimentation des maisons de naissance sera débattue au Sénat jeudi prochain (28/02)à partir de 16 heures

3- Petit appel : le PMSI m'est -très- hermétique. J'aimerais la confirmation de personnes plus habituées à manier ces données... Ce que j'ai pu trouver : accouchement sans complication et sortie à J0 Mère: GHM 24Z20Z = 1134€ + Nouveau-né de plus de 2500g en bonne santé GHM 24Z23Z = 357 €.

 

©Photo

 

19 février 2013

Racolage

 

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Un spot de pub vu hier soir m'a fait rugir de colère.

Surfant sur la vague,  un "moniteur d'ovulation" se paye des passages télé avec deux affirmations phare, "sans hormones", "sans effets secondaires".

J'avais déjà fait un billet sur le sujet l'année dernière. Mais ces sous-entendus délétères, associés aux infos du matin constatant une hausse des IVG liée à l'arrêt intempestif de la pilule justifiaient une piqûre de rappel.

Pour info, le dispositif intra utérin au cuivre est lui aussi sans hormone, totalement pris en charge par la sécurité sociale, efficace pendant au moins 5 ans et présente un taux de grossesse de 0,6 %, à comparer aux 6% annoncés par Clearblue.

Cerise sur le gâteau, on peut faire l'amour tous les jours !

 

 

Complément -tardif- d'information : il ne faut pas croire France Inter...!  Voilà ce quen dit @RRET SUR IMAGES  (je copie un extrait car l'accès libre est limité dans le temps).
Danièle Messager, la journaliste qui a réalisé le sujet, explique [...] Que lui disaient les autres gynécos qu’elle a contactés ? "Ils affirment qu’il n’y a pas encore de chiffres précis, comme je le raconte d’ailleurs dans le sujet, mais qu’ils s’attendent à une hausse des IVG dans le courant du mois de mars". Seule la gynéco affirmative aura donc été retenue dans le sujet.

©Photo

 

16 février 2013

Perdre

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Ces parents sont venus me présenter leur nouvelle-née. L'examen est normal mais leur fille a perdu du poids depuis la sortie de la maternité.

Elle est nourrie au biberon et les quantités de lait données paraissent trop basses. Je suggère de la stimuler un peu, explique qu'un bébé qui ne mange pas tout à fait assez à tendance à se mettre en mode "économie d’énergie" et à beaucoup dormir. Nous parlons des petits signes d'éveil qu'il faut saisir au vol parce qu'elle sera alors plus encline à téter.  

Le couple écoute attentivement mes conseils. Je n'ai aucune inquiétude, un peu de lait en plus et tout va rentrer dans l'ordre. Nous convenons de ne refaire le point que quelques jours plus tard.

Je les revois donc mais la courbe de poids stagne. L'examen reste rassurant. En reprenant le compte des biberons, il s'avère que le rythme n’est toujours pas bon. Je souligne que la réveiller n’est pas la déranger inutilement mais une nécessité médicale. Je n'insiste pas trop, soucieuse de ne pas inquiéter ces jeunes parents. Nous prévoyons de nous revoir le surlendemain.

Mais deux jours plus tard, la courbe de poids n’est toujours pas repartie. Je m’inquiète réellement. Refait un examen soigneux du bébé. En décomptant les biberons, je découvre qu'ils sont toujours bien en deçà du rythme demandé. Je me montre plus autoritaire en donnant des consignes très précises.  
Par précaution, je les oriente vers leur médecin traitant pour un nouvel examen.

Le médecin sera rassurant et les parents enfin décidés à suivre nos recommandations. Deux jours après, leur fille a repris du poids et ils constatent eux mêmes qu'elle les sollicite beaucoup plus souvent. Bientôt, plus besoin de la réveiller, elle prend spontanément son quota de lait.

Tout cela n’aura duré au final qu'une bonne semaine. Mais je m’interroge sur leur résistance, sur ma capacité à expliquer la nécessité des réveils. Ce sont des parents attentifs et je ne parviens pas à comprendre pourquoi ils ont tardé à suivre les conseils donnés.

Quelques semaines plus tard, en consultation postnatale, elle revient sur un petit incident. Peu de temps après la naissance, elle a donné un premier biberon, un de ces biberons de 90ml déjà conditionnés distribués en maternité. 

Le lait lui a été apporté sans consigne particulière, ou pas assez clairement énoncée. Elle a laissé téter sa fille longtemps et une grande moitié du biberon y est passée. Un peu beaucoup pour un estomac tout neuf. Quand l’équipe s’en est aperçu, les parents se sont fait gronder ; donner autant à un nouveau-né, c’était irresponsable.

Cette engueulade - c’est le terme qu'elle emploie - les a marqués. Ils avaient donné trop, il fallait donner moins.

C’est surement pour ça qu'il m'a été si difficile de les convaincre de donner plus.

 

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12 février 2013

Gagner

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Nous proposons aux parents de les suivre à la sortie de la maternité. Un accompagnement postnatal de quelques semaines qui permet de répondre aux interrogations multiples, de soutenir un allaitement, d'accueillir les inquiétudes, les doutes, la fatigue, les grands bonheurs et petits malheurs coutumiers de l'arrivée d'un nouvel enfant.

Ce bébé et sa famille sont suivis par une collègue. Absente cette semaine, elle m’a demandé d’assurer l’intérim.

Les débuts ont été chaotiques, obligeant à conjuguer mises au sein, biberons de lait maternel et de lait artificiel. L'examen de l’enfant est depuis tout à fait rassurant, il est tonique, vigoureux et la balance confirme à nouveau une prise de poids plus que correcte. Mais bien que la courbe monte en flèche, ses parents restent très vigilants au rythme et heures des tétées et biberons.

Je glisse que l’on pourrait sûrement simplifier un peu maintenant que tout s’est normalisé, supprimer le lait artificiel, augmenter les mises au sein.

Je sens le blocage et  n'insiste pas, liant leur réticence à mon irruption dans une relation établie de longue date avec une autre sage-femme.

Elle me donnera la bonne clef peu après. "Je sais bien que je suis trop fixée sur le poids, que tout va bien, que je pourrais supprimer les biberons progressivement. Mais, et elle me désigne son ainé - atteint d’une pathologie assez lourde - petit bonhomme rieur occupé à faire rouler ses camions entre les pieds des chaises,  le premier signe de sa maladie, ça a été la perte de poids."

 

 

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3 février 2013

Dangereux surbooking

 

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Un décès vient entacher la réputation de la maternité de Port Royal. Un déclenchement semblant différé faute de place dans le service qui se solde par la mort in utero de l’enfant. 

Je ne me risquerai pas à commenter des faits à travers la lecture qu'en donnent les médias. Je remarque simplement que pour les apparentes mêmes raisons - service débordé - il y avait eu l'an dernier un autre incident.

Si comme on me le soulignait très justement, la mise en cause à quelques mois d’intervalle de Port Royal n’est au final qu’un effet d’optique, le surmenage des équipes, apparaissant à l’origine des deux accidents médiatisés, est hélas commun à la plupart des "grosses" maternités.

Le problème est que le nouveau Port Royal nous est vendu comme un must permettant de conjuguer qualité des soins, humanité et confort. C’est ce que l’on pouvait lire il y a un an (8 février 2012) sur le blog célébrant l’ouverture. "Maternité de type III assurant une sécurité médicale maximale, pour toutes les grossesses (...) au sein d’une maternité repensée, plus confortable, plus accueillante"...

Ainsi, le must en matière d'organisation des soins omet une composante indispensable, la disponibilité de ceux qui sont censés les prodiguer.

L'obstétrique est une discipline médicale particulière ; le plus souvent, la médecine n'a pas réellement à intervenir. L'accouchement reste un acte physiologique et tout se passe généralement bien même avec une équipe peu disponible. Ce "bien" n'est pourtant qu'un minimum :  la mère et l'enfant quitteront la maternité en bonne santé.  La politique sanitaire actuelle se fiche du vécu des parents, de la déshumanisation de la naissance, du manque d'accompagnement... les personnels sont en effectif suffisant pour faire tourner un établissement, inutile de financer de nouveaux postes.

Mais les décrets de périnatalité qui régissent certains de ces postes omettent  qu'un service peut être quasi vide à un moment pour se remplir soudainement ensuite, que les situations pathologiques ne se distillent pas régulièrement au fil des heures mais peuvent se concentrer brutalement.

Alors oui, la plupart du temps, même sans cette attention que nous nous devons de porter à chacune des femmes présentes, l'accouchement se termine "bien". Mais de temps à autre, le manque de disponibilité conduit à méconnaître des pathologies débutantes et à devoir- dans le meilleur des cas - rattraper sur le fil des situations en train de basculer.

Comme ce rapport de l'Igas le rappelle "... Les indicateurs prénataux se situent à un niveau moyen, comparé aux performances des autres pays développés. La diminution de la mortalité périnatale est moins rapide que dans les autres pays européens. La France est également régulièrement citée pour ses mauvais résultats en matière de mortalité maternelle, même si les dernières données disponibles montrent une amélioration dans ce domaine".

Le regroupement des maternités n’est concevable que si les équipes s’étoffent en proportion. Or, sous le fallacieux prétexte des économies d'échelle, les regroupements se soldent systématiquement par une perte de postes et de lits. Le pire est que ce n'est pas forcément source d'économies. On pouvait lire en juillet dernier dans Libération "L’expérience enseigne que les processus de fusion sont en eux-mêmes sources de surcoûts ou de dysfonctionnements". 

 

Alors, on fait quoi ?

On continue à concentrer les naissances, à les industrialiser pour mieux rentabiliser locaux et personnel, à fermer les yeux sur les incidents évitables ?

Ou on réfléchit autrement, en permettant aux femmes qui le souhaitent d'accoucher - en l'absence de contre-indication - en maternité de proximité* ou en maison de naissance**, ce qui aurait  le double bénéfice de répondre aux attentes des parents tout en désengorgeant les services de haute technicité.

On continue à morceler les soins ou l'on restaure une continuité de l'accompagnement, plus sécurisante et plus efficiente, en utilisant une ressource décidément méconnue : les compétences des sages-femmes.

Il y a des sages-femmes au chômage, il y a des sages-femmes disponibles, il y a des sages-femmes motivées pour proposer autre chose que le soin minimal que le manque d'effectifs leur impose.

Cerise sur le gâteau, ces prises en charges sont à la fois sécures et économiques.

Alors, on attend quoi ?!

 

 

* Voir par exemple la fermeture de la maternité de Vire 

**Une nouvelle proposition de loi sur l'expérimentation des MDN, déposée par Mme Muguette Dini, sénatrice (UDI), devrait être examinée le 28 février prochain.

 

©Photo

 

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