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Dix lunes
22 mars 2013

Odile se contredit (3)

 

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Odile Buisson écrit vite ; elle publie le 21 février un livre évoquant la polémique des pilules de 3ème et 4ème génération sortie début janvier. Tellement vite que ses arguments trop rapidement déroulés s'opposent à eux-mêmes.

Ainsi cette femme, hospitalisée deux jours au huitième mois de grossesse pour des douleurs inexpliquées sans qu'aucune cause ne soit retrouvée, puis victime d’une grave hémorragie de la délivrance. "Il est toujours étrange de pressentir un danger sans pouvoir l'identifier", explique-t-elle après avoir conseillé à la patiente de se rendre dès les premières contractions dans une maternité  "apte à prendre en charge les grossesses à risques". C'est une hystérectomie qui permettra de sauver la mère. 

Et Odile de conclure, "l'histoire de cette patiente rappelle une vérité : une grossesse apparemment normale ne signifie pas que l'accouchement sera normal. Que serait-il advenu si elle n'avait pas accouché médicalement ?"

Faut-il souligner que des douleurs inexpliquées assez violentes pour justifier une hospitalisation de 48 heures ne sont pas vraiment à classer  "grossesse normale" ? 

Mais il serait dommage de se limiter à une seule hypothèse. Le débat peut très largement s'enrichir !
- Que serait-il advenu si cette femme avait accouché dans un établissement disposant d'un service de radiologie interventionnelle ? Son utérus aurait certainement pu être préservé.
- Que serait-il advenu si elle avait eu la malchance de résider à distance d’une maternité (leur nombre a été divisé par 2.5 sur les 40 dernières années) et de ne pas arriver à temps. Cela lui aurait peut-être couté la vie.
- La mauvaise foi ne m'étouffant pas, que serait-il advenu si elle n'avait pu quitter son domicile, bloquée chez elle du fait des intempéries ? Faut-il pour autant prévoir un chasse neige à la porte de chaque femme enceinte ?

Une politique de santé ne peut se concevoir à partir de cas particuliers.

Odile Buisson enchaîne "benoîtement" sur les maisons de naissance. Le raccourci est clair. Puisque personne ne peut prévoir comment se passera une naissance, accoucher hors d'une structure "apte à prendre en charge les grossesses à risques", c'est mettre la santé de la mère et de son enfant en danger.

Pourtant, l'accompagnement global favorisant une parfaite connaissance de la femme par la sage-femme étaye cet "étrange instinct" qui lui a fait conseiller de se rendre précocement à la maternité. Pourtant, le projet d'expérimentation impose l'attenance à une maternité. Surtout, comme le démontre cette étude britannique et contrairement à ce que Odile Buisson tente d'insinuer, pour les femmes présentant une grossesse à bas-risque, la sécurité de l'accouchement est identique quel que soit le lieu de naissance

Je l'ai déjà écrit, Odile ratisse large. A quelques pages d'écart, elle peut à la fois rappeler "la cour des comptes souligne que les maternités n'ont pas suffisamment accès aux services de radiologie interventionnelle" et dénoncer "la création de maternités gigantesques, véritables accouchoirs publics". Faudrait-il concevoir de multiples "petites"  maternités suréquipées ? Avec quel budget ? Quel personnel ? Sachant qu'elle relève ensuite que "certaines maternités disposant de financement ne trouvent pas de médecins..."

Mais Odile Buisson en reste au pamphlet. Il est plus aisé de dénoncer que de proposer.

Elle insiste un peu plus loin "La toute première cause des décès maternels est une hémorragie cataclysmique au décours de l’accouchement" en ajoutant "si les données épidémiologiques soupçonnent l'ocytocine utilisée pour réguler les contractions utérines, aucun lien formel n'a pu être établi". Odile Buisson écrit trop vite. Une  étude de l’Inserm publiée en décembre 2011 démontre au contraire que l’administration d’ocytocine pendant le travail augmente le risque d’hémorragie grave. 

Finalement les apôtres de la physiologie, les "extatiques de la matrice" n'auraient-ils pas raison de se défier? Le groupe de travail cité dans mon dernier billet précise  "La prise en charge de manière systématique de toute grossesse et de tout accouchement avec le même niveau d’intervention que celui requis par ceux qui présentent un risque comporte des effets négatifs tant pour les femmes que pour les équipes des maternités et la société."

Je m'autorise un dernier parallèle. Ce mémoire d'une sage-femme étudiant la prescription d'ocytocine dans une maternité de type 1 retrouve un taux de 45.4 % (et ce chiffre ne prend pas en compte les accouchements déclenchés ! ) Odile Buisson cite cette  étude du Ciane qui dénonce "la plupart des femmes ne sont pas prévenues de l'administration d'ocytocine pendant l'accouchement, administration rendue invisible par la pose systématique d'une perfusion". Elle ironise sur le titre de l'article - méprisamment qualifié d'articulet - "Les femmes n'ont pas leur mot à dire" "qui en dit long sur l'idée qui est véhiculée : les parturientes sont  les victimes d'une médecine totalitaire".  

Injecter sans en informer les femmes un produit qui majore le risque d'hémorragie serait donc à ranger dans la bientraitance médicale ? 

 

à suivre...

 

©Photo

 

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Commentaires
M
Au final, histoire d'être sure, lorsqu'on nous branche la perf., on peut quasi être sure qu'il y aura du synto. Pouvons-nous refuser de recevoir du synto ?<br /> <br /> <br /> <br /> Et une question perso. : j'ai accouché sans péri par choix mais j'ai "plané" pendant tout mon accouchement. J'ai longtemps pensé qu'il s'agissait d'un "réflexe" (l'impression que mon cerveau avait "débranche" de la douleur de mon corps). Avec le recul, je me demande si on en m'a pas donné des calmants par perfusion. C'est possible ?
S
une médecine totalitaire: la première fois que j'ai entendu ce terme c'est chez Martin Winckler, à qui un ancien déporté de la seconde guerre lui a dit avoir revécu la même dévalorisation en hopital que dans les camps, et là cela m'a rappelé la pression qui m'a été mise pour que j'accepte un déclenchement à 38SA sur conditions locales defavorable dont la nécessité était plus que discutable (fini en cesarienne car pas une seule contraction notable en 3j), en fait parceque le chef de service avait décidé!<br /> <br /> * "si on attend le terme, on risque la distocie des épaules" (sans explication ca fait peur) -> refus de déclenchement de ma part, on gagne 2 jours<br /> <br /> * "vous avez le choix entre le déclenchement et le risque de mort foetale" (pas besoin d'explication ca fait peur) -> refus de déclenchement de ma part, on gagne 2 jours<br /> <br /> * "tachycardie au RCF" (qui s'est révélé plus tard tout relatif) -> je demande pas d'explication j'ai peur, j'accepte le déclenchement<br /> <br /> * 2j de déclenchement au propess, sans rien à boire, 1 repas par jour, pas d'accompagnement, toutjours pas de contractions, bébé en pleine forme-> je demande à rentrer chez moi pour le week end <br /> <br /> * "la dernière fois que l'on a accepté, la mère est revenue trop tard, le bébé était mort (historique de la mater vérifié c'etait FAUX), on vous laisse décider avec votre mari, et on passe au déclenchement au synto". Devant une telle menace de mort, la liberté de décision me parait faible, on accepte.<br /> <br /> * et une dernière pour la route, après 5j d'hospitalisation post césa, bébé de 3,9kg en pleine forme qui a perd 10g le dernier jour par rapport à la veille "ah il a perdu 10g, pas sûr qu'on vous laisse sortir" Comme on commence à se rebeller (après tout je veux bien revenir tous les jours faire peser mon bébé si cela les inquiete) "bon, finalement, on a décidé de vous autoriser à sortir".<br /> <br /> Je suis sortie de la maternité comme (j'imagine) un détenu sort de prison, et je ne peux plus passer devant cette maternité sans me sentir mal. Oui, certaines maternité ont un comportement totalitaire!
M
Mais c'est que cela me donnerait presque envie de le lire ce livre à force d'en voir quelques épisodes décryptés sur ce blog... En tout cas merci pour les analyses! ;)
S
J'ai eu la chance d'être suivie en accompagnement global pour mes 2 grossesses ... mais dans le genre "médecine totalitaire", voici ce qu'un dentiste m'a répondu il y a quelques mois, alors que je tremblais devant sa fraise, souffrais de ma rage de dents et que j'ai osé lui demander ce qu'il allait faire : "ah ben vous êtes bien une prof, à toujours vouloir tout savoir" ... Il y a un module pendant les études de médecine pour apprendre à humilier les patients ou quoi ??? Merci en tous cas 10lunes pour tes billets toujours si pertinents, toujours si bien écrits ... une vraie bouffée d'oxygène !
S
Je plussoie chaisplusqui disant que tu as bien du courage de te taper ce texte (un autre mot commençant par t et finissant par chon me venait plus facilement hein).<br /> <br /> C'est un concentré des pires caricatures existantes, le coup de la grossesse normale jusqu'à ce que Zorro arrive et sauve la mère et l'enfant sur son cheval au galop.<br /> <br /> Elle met des références à la fin de son livre ou c'est juste "j'ai raison parce que c'est moi qui le dit plus fort?"<br /> <br /> Si ça se trouve t'as bien raison, c'est juste vite-écrit, mal-écrit hein, courage pour les prochains paragraphes!
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