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Dix lunes
13 mars 2013

Sous le signe du lien

 

5398546351_035100ff3e_bAprès l'argumentation spécieuse d'Odile Buisson, voilà qu'un autre médiatique gynécologue aligne les affirmations tendancieuses.

Comme il serait dommage ne pas en avoir connaissance, je vous copie ci-dessous l'intégralité d'une interview diffusée sur France Bleue Alsace le 4 mars dernier.

Les maisons de naissance bientôt testées dans toutes la France ?

Le Sénat devrait voter dans les prochaines semaines une proposition de loi qui prévoit d’expérimenter ces structures attenantes aux maternités. Elles offrent aux femmes la possibilité d’accoucher sans être hospitalisées. Le suivi est assuré uniquement par une sage-femme. En ligne avec nous le professeur Israël Nisand gynécologue obstétricien à Strasbourg. Bonjour !

Bonjour.

Vous connaissez très bien ce dossier puisqu’il existe une forme de maison de naissance à Strasbourg depuis 2004. Vous en êtes d’ailleurs le responsable. Cela signifie qu’il y a aujourd’hui une vraie demande de la part des femmes ? Est-ce que c’est parce que l'accouchement est devenu trop médicalisé professeur Nisand ?

Non il n'y a pas de vraie demande parce que nous offrons 8 salles de maisons de naissance à Strasbourg depuis 2004 et ça correspond à 3 % des accouchements, donc il n’y a pas de réelle demande ce n’est pas en augmentation. Il y a une demande de certaines professionnelles de s’affranchir de la tutelle des médecins mais il n’y a pas de demandes de patientes.

Le Professeur Frydman, autre gynécologue médiatique, évoque lui une demande de 10 à 15 %*. C'est bien parce que ces salles physiologiques n'ont rien à voir avec une maison de naissance que la demande ne se développe pas. L'accompagnement global est une des clefs de voute du succès. Réduire le concept à une salle un peu plus accueillante bénéficiant d'une baignoire, c'est démontrer ne rien avoir compris ni à l'idée défendue, ni surtout aux attentes des femmes.

Donc c’est plus un débat purement médical alors, c’est ce que vous nous dites ?

C’est un débat assez corporatiste parce qu’il y a dans pratiquement toutes les maternités de France des secteurs physiologiques où l’on peut accoucher en faisant moins de médecine. Mais si on s’éloigne des salles d’accouchement, on s’éloigne aussi de la possibilité d’avoir une péridurale et cela c’est pas dit dans la chanson. Comme actuellement il y a une assez mauvaise météo pour les femmes, je dis que ces maisons de naissance à distance des salles d’accouchement où il n’y aura plus de péridurale possible c’est un peu une tromperie pour les femmes.

Les salles physiologiques sont loin, très loin, d'être présentes dans toutes les maternités de France.
Par ailleurs, opposer les unes aux autres est absurde.  Est-ce que l'on imagine opposer maternités de type 1 ou 3 ? Ce sont des offres de soin complémentaires, pas interchangeables.
Quant à tromper les femmes...

Oui parce que vous à Strasbourg, c’est vrai que les salles sont vraiment incluses dans la maternité, enfin les médecins peuvent venir à tout moment alors que la proposition loi ne prévoit pas ça. C’est ce que vous dénoncez ?

Voilà, voilà, c’est ce que je dénonce. C’est sûr qu’un certain nombre de sages-femmes ont envie de devenir chef de service et de s’affranchir de la tutelle des médecins mais je rappelle qu'un accouchement à tout moment peut tourner à une complication, que les sages-femmes n’ont pas la compétence pour gérer les complications et que s’il faut au moment d’une complication se mettre à se déplacer pour rejoindre une salle d’accouchement traditionnelle on est dans le mal fait aux femmes.

Marteler le mot complication ne fait pas une démonstration. Ces lieux sont destinés à des femmes ne présentant aucune situation particulière, et le dépistage de possibles complications est de la responsabilité et de la compétence de toute sage-femme. Cela dit, oui certaines femmes seront transférées de la maison de naissance à la maternité comme d'autres le sont d'une "salle d'accouchement traditionnelle" au bloc opératoire.

Et donc à ce titre là, je trouve que la question corporatiste qui est posée de savoir si les sages-femmes doivent ou non être chef de service ne justifie pas que l’on éloigne les femmes des endroits où l’on peut les soigner correctement.

La motivation des sages-femmes serait donc d'être calife à la place du calife ? L'argument semble tellement mesquin qu'il ne mérite pas que l'on s'y attarde. Dans cet autre billet, je soulignai le possessif du Pr Nisand évoquant "ses" sages-femmes.

Mais revenons au bien être des patientes est ce que ça ne peut pas quand même servir certaines femmes d’accoucher de façon plus naturelles aujourd’hui ? Il y en a qui le souhaitent.

Mais c’est le cas dans pratiquement toutes les maternités et de mon point de vue il suffisait de mettre l’accélérateur sur des salles d’accouchement dédiées à la maison de naissance à l’intérieur des salles d’accouchement.
Mais le fait de s’éloigner des salles d’accouchement et de faire des services d’accouchements bis avec le prétexte que à ces endroits on aura plus de sages-femmes pour s’occuper des femmes, et bien mettons les moyens sur les salles d’accouchement qui n’ont pas les moyens actuellement de s’occuper vraiment méticuleusement des femmes. Il n'y a pas besoin de créer de nouvelles structures pour cela. Il suffit de donner un peu plus de personnel dans les maternités pour qu’on n’ait plus d’accident de type Port-Royal et que l’on puisse s’occuper un peu mieux des patientes qui souhaitent démédicaliser leur accouchement. Mais créer de nouvelles structures pour ça, ça me parait très mauvais pour les femmes.

Là encore, il est absurde d'opposer les deux. Il faut à la fois plus de sages-femmes en structure et des sages-femmes en maison de naissance. Et quid de l'accompagnement global ?

Donc vous pensez que ce n’est pas le vrai argument, vous citez l’exemple de l’accident de Port-Royal est ce que ce n’est pas aussi pour désengorger les maternités tout simplement ?

Mais ça ne va jamais désengorger madame puisque la demande est à hauteur de 3 %. Ça ne va rien désengorger. Ça va mettre beaucoup de moyens sur un petit nombre d’accouchements alors que là où il y a besoin de gros moyens humains on ne les mettra pas.
Donc je préférerais que plutôt qu’on utilise des sages-femmes pour faire 150 accouchements par an ce qui est prévu dans les maisons de naissance, on rajoute ces moyens dans les endroits où y a beaucoup d’accouchements pour que les pépins… si vous voulez pour qu’on ait des pépins dans les maternités qui font beaucoup d’accouchements et des lieux d’accouchements physiologiques avec beaucoup de sages-femmes pour très peu d’accouchements ne me parait pas raisonnable, en tout cas ça va contre l’égalité des femmes entre elles.

En maison de naissance, le ratio serait d'environ 50 accouchements par sage-femme et par an. Mais il ne s'agit pas que d'accouchement. L'accompagnement global, c'est aussi le suivi médical, la préparation à la naissance, le suivi postnatal à domicile.
On compte en France environ 20 000 sages-femmes pour 800 000 naissances, soit une sage-femme "utilisée" pour 40 accouchements... 

Une dernière question puisque c’est un argument aussi pour cette proposition de loi, c’est le coût. On nous dit que l’accouchement dans ces lieux reviendrait moins cher qu’à l’hôpital, c’est vrai ou faux professeur Nisand ?

C’est une tromperie madame, c’est une tromperie. Quand on regarde les salles d’accouchement aujourd’hui, on a fait, tout le monde a fait des efforts pour que l’argent public soit utilisé correctement. Dire qu’avec 2 ou 3 sages-femmes (rires) on va faire 150 naissances là où on en fait 4000 par ailleurs je veux bien qu’on m’explique que ça va couter moins cher mais ça va couter bien plus cher et en plus ce sont des endroits ou en cas de douleur extrême on ne pourra pas faire de péridurale. Dans la maison de naissance de Strasbourg, 35 % des femmes qui avaient l’intention d’accoucher en maison de naissance finissent par demander, malgré l’acupuncture, malgré l’analgésie qu’on y fait, d’être transférées dans la pièce d’à côté pour bénéficier d’une péridurale.

Cela coutera moins cher et les transferts pour péridurale seront bien inférieurs.
Notre problématique est justement d'avoir l'occasion de le démontrer.
Rappelons que la proposition de loi ne concernerait au maximum qu'une dizaine de sites.
Il ne s'agit pas de révolutionner l'obstétrique française mais d'entrouvrir la porte à une expérimentation...

Le seul point positif est que le reproche d'une moindre sécurité semble abandonnné. Une récente étude le démontre - à nouveau ! - cette thèse ne tient pas.

En dehors de notre supposée lutte pour les chefferies, le seul argument multimartelé est l'absence de recours à la péridurale. Les sages-femmes seraient donc assez malhonnêtes pour taire cette information, les femmes assez stupides pour ne pas les interroger et les maternités assez perverses pour refuser le transfert en cas de besoin ? 

Prétendre défendre la cause des femmes en niant leur droit à décider pour elles-mêmes me semble un exercice périlleux.

Merci beaucoup professeur Israël Nisand pour ces explications.

 

 

Une petite étude présentant les résultats de maisons de naissance suisses (l'une d'elles se nomme "Dix lunes" mais aucun rapport avec le blog) 

 

 

*Y a-t-il des grossesses et des accouchements à bas risque ? C. Colmant a,b, R. Frydman a, Gynécologie Obstétrique & Fertilité 37 (2009) 195–199

 

©Photo

 

 

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Commentaires
B
vais vomir ... Nisand, le chantre du cytotec ("teeeeeeeeellement bon marché" que ça serait impensable de s'en passer, selon ses propres mots), proner la physio ... on dirait un boucher qui défendrait le végétarisme ! <br /> <br /> sans compter qu'il s'y connait autant en physiologie que moi en moteur de fusées (faut voir sa démonstration au procès des bb congelés ... vais vomir bis)<br /> <br /> <br /> <br /> quant à O. Buisson - décidemment ton papier 10lunes est un puissant émétique ...
F
@ emi "- la péri est un acte médical qui peut entrainer des conséquences auxquelles il convient d'être raisonnablement informée". Mille fois oui ! Quelle femme a été correctement informée sur cet acte non anodin qu'est la péridurale ???
G
Pitié 10lunes, faites un article sur celui d'Odile Buisson s'il vous plaît, que je puisse le partager sur ma page facebook et essayer de calmer mes nerfs car je bouillonne de faire partie de cette minorité qui passe pour des décérébrés incapables de comprendre que accoucher sans douleur avec la péri est LA solution.<br /> <br /> <br /> <br /> (mes commentaires sur l'article ne passent pas. Je dois avoir un ton trop énervé)
C
Pour corroborer les dires d'emi, paradoxalement, j'ai obtenu plus de présence de la part de la sage-femme, enfin, de l'étudiante, après la péridurale, pour surveillance de la tension, ironie du sort, alors que j'étais laissée seule sanglée au monito (refus de l'enlever de la SF...), tout le reste du temps. Et que j'aurais vraiment souhaité un peu de présence avant !...<br /> <br /> <br /> <br /> Finalement, ils n'ont peut-etre pas tort ces médecins. A quoi bon remuer ciel et terre pour son accouchement physio, pour mieux se casser le nez, mal le vivre, déprimer... En l'état actuel de la prise en charge de l'accouchement, la résignation est peut-être plus appropriée.
E
Dans le débat sur la demande d'accouchement 'naturels', Nissand inverse cause et conséquence, ce qui est fort de mauvaise foi étant donné son niveau scientifique probable.<br /> <br /> Ce n'est pas qu'il y a 3% de DEMANDES, c'est qu'il n'y a que 3% de femmes qui trouve moyen d'accoucher en physio. La demande existe, c'est l'OFFRE qui n'est pas là. Et cette offre ne peut pas être 'uniquement' d'un lieu physio pour accoucher, mais bien de l'ordre du suivit global comme le souligne 10lunes.<br /> <br /> De plus, concernant la péri, plus je lis des témoignages sur les accouchements, plus je constate que : <br /> <br /> - sans accompagnement global, laissée à elle même, les femmes en travail sont plus souvent en souffrance et semble demander plus aisément/rapidement une péri. On les y incite. Rien n'est fait pour soulager (par la parole, par le conseil, par le bain, par la présence) celles qui auraient fait le choix du 'sans péri', voire au contraire je note beaucoup de commentaires de femmes qu'on a renvoyé dos à dos avec cette décision et qu'on a laissé seule, du coup (pas de péri = pas de surveillance = pas d'accompagnement = bien fait pour ta gueule madame t'avais qu'à prendre la péri).<br /> <br /> - La peur de la douleur que professent beaucoup trop de médecin et soignants est un vrai calvaire en soi : de quel droit on sur-stresse les femmes avec ça ? Oui, un accouchement ça fait mal. Oui, sans péri on douille plus qu'avec, forcément. Mais oui aussi, la plupart du temps, on peut faire sans une fois qu'on a travaillé là dessus, mentalement, physiquement, et qu'on est accompagné (on y revient). <br /> <br /> - la péri est un acte médical qui peut entrainer des conséquences auxquelles il convient d'être raisonnablement informée, au même titre que n'importe quel acte médical. C'est cet aspect là (et les aiguilles, je hais ça) qui m'a le plus décidé à ne pas la demander pendant mon accouchement, perso (accouchement qui a bénéficié d'un suivit global, je précise).<br /> <br /> Merci à celles qui réagissent, qu'elles soient pro ou non, il y va de la qualité des soins en France et de la sauvegarde d'un système de santé mal en point, car rappelons le quand même, une péri ou un accouchement en structure type 3 ce n'est pas gratuit, un accouchement qu'on vit mal ce sont des suites psychiques qu'on l'on peut trainer un moment et qui ont forcément une incidence à la fois sur la confiance que l'on place en les médecins, et sur la vie avec bébé.
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