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Dix lunes

25 décembre 2010

Demande au Père Noël

François Brottes, député socialiste, vient de déposer un cadeau au pied de notre sapin en réclamant la possibilité pour les sages-femmes pratiquant les accouchements à domicile d’avoir accès à une assurance à tarif décent.

Beau geste qui aurait gagné à se montrer précis. Il évoque un coût de 25 000 € dont 6000 € pris en charge…
Les obstétriciens bénéficient depuis 2006 et à certaines conditions d’une subvention allant de 55 % à 66% (plafonnée à 12000 €) du montant de leur prime.
Hélas, les sages-femmes n’ont droit à aucune aide leur permettant de réduire le coûtde leur responsabilité civile professionnelle pour la pratique des accouchements. Les tarifs, parfaitement raisonnables pour l’exercice en maternité - entre 200 et 1200 € selon les assureurs - grimperaient à 19 000 € pour les naissances à domicile.

Pourquoi ce conditionnel ? Parce que bien évidemment aucune sage-femme n’a les moyens de verser une telle somme. Le bureau central de tarification, saisi en 2008, était dans l’obligation de nous trouver une assurance. Il s’y est conformé, mais en imposant ce tarif exorbitant.
Rappelons que l’accompagnement global* de la naissance, corollaire de l’accouchement à domicile, fait qu’une sage-femme ne peut raisonnablement s’engager pour plus d’une cinquantaine d’accouchements annuels. Cela revient à dire que la totalité de la rémunération (312.70 € pour le suivi de l’accouchement et des 7 jours suivants) ne permet même pas de financer l’assurance !

Je me sens donc en parfait accord avec ce député lorsqu’il affirme que « que les tarifs prohibitifs proposés en France viennent de fait interdire cette pratique » et qu’il interpelle notre nouvelle secrétaire d'Etat à la Santé, Mme Nora Berra, pour « connaître les dispositions qu'elle entend prendre pour évaluer la pertinence de la pratique de l'accouchement à domicile, et permettre que cette option reste offerte aux mères qui le souhaitent ».

Evaluer cette pratique en analysant les données françaises est réclamé depuis longtemps par les sages-femmes. Les études réalisées dans d'autres pays nous donnent raison mais curieusement, leur validité ne traverse pas la frontière.
A l’inverse, un certain nombre de publications étrangères récentes mélangeant allégrement accouchements programmés à domicile et accouchements inopinés, suivis par une sage-femme ou sans assistance médicale, aux résultats évidement mauvais, sont largement relayés…

Au pied du sapin, je ne demande aucun passe droit, aucun arrangement… Pouvoir compter sur l’honnêteté de nos partenaires institutionnels et médicaux serait un superbe cadeau.


*Accompagnement global : une même sage-femme assure la totalité du suivi, du début de la grossesse aux suites de couche.

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21 décembre 2010

Commère

Visite à domicile dans l'immeuble d'une vague connaissance.

Je la croise en repartant, encombrée par le pèse-bébé et la mallette portés en bandoulière, une main tenant le téléphone pour écouter le message reçu quelques minutes avant, l'autre fouillant sans succès mes poches à la recherche de mes clefs.
Ainsi empêtrée, je me démène pour appuyer sur le bouton d’ouverture de la porte, happer la poignée avant que la sécurité ne la bloque à nouveau en espérant me faufiler dehors.
Trop tard, elle me coince !
- Bonjour ! Tu vas bien ? Mais que fais-tu ici ?
- Ben je travaille…
- Ah oui  ? T'as vu qui ?

Je n’ai pas à le dire et ne réponds pas. Mais vu la proportion de troisième âge dans l’immeuble, doit pas y avoir beaucoup de possibilités.
- Ah oui, que je suis bête, ma voisine du dessus… elle vient d’avoir un bébé. Et alors, ça va bien ?

Elle me barre la route
- Oui oui, très bien…
- Elle a accouché quand ?
Ca s'est bien passé ?

Je tente l'esquive humoristique
-Tu sais secret médical toutça toutça …

Peine perdue, elle poursuit
- Le père était là ?

Je cherche à m’enfuir me dégager mais elle insiste
- Tu les trouves comment ?
- Très sympa, très sympa ! Bon ben faut que j’y aille, j’ai une autre visite à faire.
- Ah oui très sympa ? Parce que dans l’immeuble, on est un peu mitigés. Ils sont arrivés récemment et…
- Bon ben j’y vais
- Oui parce qu’on leur reproche quand même….
- Je veux pas le savoir, ça ne me regarde pas !

- … de faire l’amour un peu fort !

J’ai bien tenté de parler plus haut et de clamer mon au revoir pour couvrir le son de sa voix.
J’ai entendu quand même.

Et pourquoi est-ce moi qui me retrouve honteuse de ce commérage reçu contre mon gré ?

17 décembre 2010

Salve 3 et mise à mort

Le site du Conseil Constitutionnel vient de publier ses conclusions au sujet de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Certains articles sont déclarés non conformes. Le texte défile rapidement à coup de clics ... bref instant de joie, l’article 40 n’est pas cité.
Joie trop brève car une lecture plus attentive montre que l’article 67 est abrogé. Et l’article 67 est bien celui qui concernait l’expérimentation des maisons de naissance dans la loi définitive.

C’est donc reparti pour un tour de manège
Evidemment, les raisons invoquées ne concernent en rien l’expérimentation. Le Conseil Constitutionnel considère simplement "que ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ; que, par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale".

Mais pour les femmes, les parents, les sages-femmes, cela veut dire qu’il faut repartir au combat.

La levée de bouclier des députés et sénateurs, téléguidés par nos amis les médecins, démontrait que tout serait mis en œuvre pour faire échec au projet.
Et nous redoutions que l’expérimentation soit vidée de son sens à coup de protocoles imposés, de proximité immédiate et autres exigences sécuritaires niant les résultats étrangers.

Mais même cette première timide amorce de demi-pas en avant ne sera pas.

Le village gaulois persiste et signe. Il ne sera pas dit que la France s'aligne sur ses voisins européens, qu'elle accède à une demande grandissante des parents, qu'elle redonne une juste place aux sages-femmes dans l’accompagnement de la maternité physiologique, qu'elle renvoie les médecins spécialistes à leur domaine d’exercice spécifique, la pathologie.

Chapeau bas messieurs les obstétriciens !
Vous avez défendu avec succès votre territoire pour continuer à expédier en quelques minutes de banales consultations, insérer index et majeur gantés de plastique dans les vagins et rassurer vos patientes par un "je serai là Madame", omettant de préciser que ce "là" désigne  les cinq dernières minutes de leur accouchement.

Vous persistez à sous-exploiter les compétences acquises au cours de longues et couteuses études financées par la collectivité.

Vous êtes convaincus que tout accouchement, quelles qu'en soient les circonstances, est une bombe en puissance. Vous méconnaissez l’impact d’un accompagnement attentif dans les phénomènes complexes de la mise au monde et vous nous refusez la possibilité de démontrer son efficacité.

Certains couples projetant un bébé pour l’année prochaine se réjouissaient de trouver un lieu conforme à leurs désirs.
Certaines sages-femmes se félicitaient d’avoir enfin la possibilité de montrer ce qu’accompagner veut dire.

Cela ne sera pas...

... tout de suite.

Mais d'évidence, nous gagnerons ce combat. Malgré l'évidente mauvaise foi de nos détracteurs, la conjugaison des attentes des parents et des professionnels, des expériences étrangères et des réalités économiques nous donnerons raison.

Soyez certains de notre détermination !

12 décembre 2010

Salve 2

Nous assistons à un tir groupé  - d'où les titres des deux derniers billets - de communiqués divers mettant en cause toute alternative à la prise en charge habituelle de la maternité. Un nouvel exemple en est cette enquête° Ipsos commandée par le CNGOF (Collège des Gynécologues Obstétriciens Français) qui conclût fièrement que les femmes préfèrent très majoritairement accoucher à l’hôpital ( 64% ) ou en clinique ( 25% ).

C‘est heureux puisque la France ne propose guère d’autres choix.

2% souhaiteraient accoucher à domicile, ce qui fait malgré tout, rapporté aux 822 985 naissances dénombrées par l’INSEE en 2009, plus de 16 000 femmes concernées. La CNAM annonce de son côté 1945 "forfaits accouchement"* réglés aux sages-femmes pour l’année 2009. Entre ces deux chiffres, y a comme un décalage que les contre-indications à l’accouchement à domicile ne suffisent évidemment pas à expliquer. Plusieurs milliers de femmes renoncent chaque année à accoucher à la maison parce qu’aucune sage femme ne peut les accompagner (j’ai déjà exposé les raisons de cette désaffection).

Ne nous étonnons pas de ces 73% de femmes n’ayant jamais entendu parler des maisons de naissance. Il faudrait d’abord que ces lieux existent pour que les parents puissent se saisir de cette offre…l'ignorance n’est pas équivalente au refus d'en bénéficier.

Reste une question subsidiaire ; où les 9% de femmes (soit 75 000) qui ne veulent accoucher ni en maternité ni à domicile souhaitent-elles mettre leur enfant au monde ?

Je fais le pari qu’une maison de naissance leur irait bien. Faut juste les ouvrir…

° Cette enquête était prévue pour les 34ème Journées nationales du CNGOF qui se terminaient hier. On devrait prochainement pouvoir accéder à cette présentation sur leur site.

* 1945 est le nombre de "SF 118"- cotation de l'accouchement - payés directement aux sages-femmes libérales en 2009. Ce chiffre inclut quelques accouchements à domicile non programmés, et d’autres accompagnés par une sage-femme libérale sur un plateau technique. Il est extrêmement difficile de disposer de données précises.


11 décembre 2010

Salve 1

Décidément, l’Académie de médecine s'intéresse beaucoup à l’obstétrique ces derniers temps. Un nouveau communiqué vient s'opposer à l'expérimentation des maisons de naissance avec des arguments… irrecevables.

Le premier concerne l’absence d’hospitalisation qui "peut générer des conséquences très graves tant pour la mère que pour l’enfant"
Rappelons que pour être suivie et accoucher en MDN, une femme doit être en bonne santé, présenter une grossesse normale, accoucher sans difficulté et à terme. De plus, mère et nouveau-né ne pourront quitter la MDN qu'après quelques heures de surveillance et l'assurance que l'un et l'autre vont bien.
Enfin, la sortie est préparée, ils sont entourés par famille ou amis qui veillent à leur bien être et peuvent faire appel à la sage-femme à tout moment ; sage-femme qui passera très régulièrement et au moins quotidiennement les jours suivants.
Tout cela me semble beaucoup plus sécuritaire que ce que vivent nombre de mères et de bébés quittant rapidement la maternité, sans suivi, sans garantie d’avoir un soutien à leur domicile et quels que soient leurs antécédents … Non ?

Mais nos académiciens s’inquiètent également du partage des responsabilités. "En cas de transfert vers le service de gynécologie obstétrique, qui sera considéré comme responsable, la sage femme ayant suivi la grossesse et le travail ou l’obstétricien ayant terminé l’accouchement par une pose de forceps ou une césarienne ? "
Je l'ai déjà écrit ici, cette situation est excessivement banale. Dans toutes les maternités, toutes les surveillances sont confiées aux sages-femmes, charge leur étant donnée de dépister les éventuelles complications pour les référer à l’obstétricien…
Est ce mon habituel mauvais esprit ou faut-il comprendre que c'est l'indépendance de sages-femmes exerçant leurs compétences de façon autonome qui est redoutée ?

Et que dire des "solutions" proposées ?

La création d’espaces physiologiques est une excellente idée qui aurait pu se développer depuis…une génération !
La maternité mutualiste de Nantes (je profite de l’occasion pour rappeler qu’il y a une pétition à signer ici) a par exemple ouvert ses portes en 1987 avec deux salles physiologiques, murs plaqués de bois, baignoire et bassin, matelas au sol et tabouret d’accouchement…  Rien n’est plus simple que de créer ces espaces. Mais cela ne suffit pas ; il faut aussi que l’équipe présente ait la disponibilité nécessaire pour accompagner les parents. La proposition de renforcer les effectifs est donc un corollaire indispensable.
Il faudra cependant faire remarquer à nos académiciens que la demande des couples est aussi celle d’une prise en charge globale, par des professionnels connus bien en amont de la naissance.

Quand à la suggestion d’ouvrir les plateaux techniques, j’hésite entre rire et pleurer… D’abord parce que c’est possible depuis 1991 mais que les établissements se montrent plus que réticents. Surtout parce que cela ne répond en rien aux deux objections soulevées dans le communiqué ; maison de naissance attenante ou plateau technique, la situation serait identique :
- l’accouchement en plateau technique se fait en ambulatoire ; aucune hospitalisation n'est prévue ensuite.
- quant au partage des responsabilités, il est encore plus flou puisque l'éventuel relai n'est même pas marqué par un changement de lieu.
Au final, la volonté ne serait-elle pas d'assujettir les sages-femmes, et à travers elles les femmes, à l’autorité des médecins ?
Compétentes : oui
Responsables : à 100%
Mais autonomes… Non !

Enfin je m’étrangle sur la mention "privée" ? Ainsi, ce type d’accompagnement ne mériterait pas d’exister dans le public. Est-ce une façon de botter en touche en libérant les hôpitaux de cette "contrainte" ou un service rendu au privé en lui procurant de nouvelles clientes ?
Dans le privé, ce ne serait soudain plus un problème de risque, ni de responsabilité, juste un problème de fric ? Je m’étrangle vous dis-je !

PS : 60 députés de l’opposition ont saisi le conseil constitutionnel le 1er décembre en demandant le contrôle de constitutionnalité de la loi de financement de la sécurité sociale 2011. L’article 40 ne semble pas ciblé particulièrement. A suivre...

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7 décembre 2010

Ejectés

L’académie de médecine s’inquiète des sorties précoces de maternité, sources de complications potentiellement graves pour les enfants.
Stairway, lectrice, m'a gentiment demandé d’expliquer que les académiciens ont tort… ça ne va pas être possible.

Effectivement, l’ictère est le plus souvent banal chez le nouveau-né mais il peut évoluer vers des complications graves, heureusement très exceptionnelles. Ces ictères peuvent se traiter à condition d’être dépistés. Le premier niveau du dépistage, simple, évident, est de surveiller la couleur de la peau.
Encore faut-il que quelqu’un s’en préoccupe…

Ce qu’il faut dénoncer, ce ne sont pas les sorties précoces mais la pénurie de lit en maternité amenant les équipes à mettre à la porte mères et bébés de plus en plus rapidement.
L’académie de médecine ne dit pas autre chose quand elle s’inquiète «de la pression administrative pour une sortie de maternité de plus en plus précoce, parfois sans avis pédiatrique et sans information adéquate des parents ».

Par manque de place et par manque de personnel, de nombreuses femmes quittent la maternité dès le deuxième ou troisième jour, sans qu'aucun accompagnement ne soit envisagé. La seule consigne donnée est de voir un médecin pour la consultation prévue en fin de mois. Dans le meilleur des cas, il sera proposé de prendre rendez-vous avec la PMI ou une sage-femme libérale, mais ce sera aux parents de faire la démarche. Dans les premières semaines, ils se retrouvent seuls, démunis et débordés. Au point d'hésiter à aller consulter, appréhendant un avis professionnel qui viendrait souligner leur incompétence supposée.

Une sortie précoce, c’est tout le contraire. C’est d’abord un choix, si possible préparé en amont, par une famille qui a envie de se retrouver rapidement dans le cocon de son foyer, de vivre à son rythme, de s’occuper de son enfant sans les contraintes imposées par la gestion des établissements.
C’est une famille qui a organisé ce retour afin que la mère puisse se reposer, en n’ayant d’autres soucis que de prendre soin d’elle même, materner son tout petit et câliner les ainés quand il y en a.
C’est une famille sachant qu’elle peut compter sur le soutien d’une sage-femme passant quotidiennement les premiers jours.
C’est une sage-femme attentive au bébé, observant son éveil, son tonus, sa croissance et … la couleur de sa peau.
Lorsque cette sage-femme est connue avant la naissance, le suivi postnatal fait lien avec celui de la grossesse. Dans cette évidence de la confiance installée au fil des mois, les questions se posent, les inquiétudes se dénouent, les gestes s'affirment.

En quelques dizaines d’années les séjours en maternité de plus d’une semaine se sont réduit à un passage éclair, sans pour autant généraliser le suivi à domicile. La rentabilité des établissements est à ce prix mais quel en est le coût réel ? Des ictères gravissimes ? Peut-être, je n’ai pas trouvé de données françaises sur la question (mais je n’ai pas beaucoup cherché). Mais que penser des arrêts précoces d’allaitement, des dépressions sournoises, des troubles de la relation mère enfant, des couples en difficulté devant des pleurs incompréhensibles ?

Ces complications là sont moins visibles, moins explosives. Sont elles moins couteuses ? Le soutien social est un élément essentiel du bien être postnatal. Dans une société du chacun pour soi, quel mal faisons-nous en pensant suffisant qu’une mère et son bébé quittent la maternité en bonne santé ?


Rien à voir : j'ai déjà écrit ici sur ces lieux "alternatifs" qui sont en train de disparaitre. L'une de ces équipes se bat pour préserver ses valeurs et met en ligne une pétition. Contrairement à ce que son nom pourrait laisser croire, c'est une maternité et non une maison de naissance. Mais toute son histoire s'est construite - jusque dans un passé récent - sur le profond respect des parents venant y accoucher.

5 décembre 2010

Territoire

Tonique, gigoteur, grassouillet, l’œil vif... Ce petit garçon de quinze jours est en pleine forme. 

On ne peut en dire autant de ses parents. Ils sont à l’évidence fatigués et je cherche à comprendre ce qui se passe.
La maman est en congé maternité, le père non en congé paternité comme je le suggère mais au chômage ; au ton un peu vif de sa réponse, je comprends que je l’ai blessé. 
Ce bébé, leur premier, se réveille de façon très raisonnable pour son âge, deux fois dans la nuit et se rendort plutôt facilement après la tétée.
Il n’en est pas de même pour ses parents. Se lever - ils le font en alternance - allumer la lumière, traverser l’appartement un peu froid pour aller chercher leur petit, revenir le mettre au sein dans le lit, attendre la fin de la tétée, refaire le chemin en sens inverse, retourner se coucher et… chercher ensuite trop longuement à retrouver le sommeil.

Je suggère que le bébé pourrait peut-être dormir dans leur chambre pendant quelques jours, semaines (mois ?). J'aimerais leur éviter ces déambulations nocturnes qui les réveillent trop et écourtent leurs nuits.

Dans un même mouvement de tête, ils s’opposent à cette idée.
Ce n’est pas envisageable, dans la chambre, il y a leur chat.
Et quand je propose de faire dormir le chat dans une autre pièce, ils s’amusent de mon innocence.
Ce ne sera pas possible, le chat ne pourrait pas le supporter…

30 novembre 2010

Rigueur

Fin des années 70. L’hôpital est déjà à la recherche de la formule magique, celle qui permettrait de garantir le bon déroulement de l’accouchement par le respect de diverses normes.
Ainsi, de nombreuses règles définissent rythme et régularité des contractions, temps de dilatation et durée de l’expulsion.
Concept absurde qui imagine appliquer la rationalité mathématique à l’imprévisibilité de l’humain.

Il était donc inscrit que la phase dite d’expulsion - quel méchant mot pour désigner ce moment - ne pouvait dépasser 20 minutes.
Pari souvent tenable si l’on donne le temps à l'enfant de cheminer dans le bassin maternel, si l'on attend que l’envie de pousser s’impose, si la mère est libre de ses mouvements.
Pari irréaliste pour une femme en position gynécologique sommée de pousser dès dilatation complète. Mais le protocole disait aussi qu'il fallait s'y atteler sans tarder …

Chaque matin, l'équipe se réunissait. Les accouchements de la veille étaient commentés au travers de leur épais dossier. Parmi les documents contenus, le tracé du monitoring. Les femmes étaient reliées à la machine tout au long de leur travail et le papier défilant à la vitesse d’un centimètre par minute en décomptait les différentes phases.
Lors du staff, les accordéons gris pale quadrillés de noir s’étiraient entre les mains du "patron". Deux courbes s'y répondaient, l’une pour les contractions utérines, l’autre pour le rythme cardiaque du bébé. L'ensemble était parsemé de notes manuscrites ; tension, température, médications, dilatation, position fœtale se devaient d'être consignés au fur et à mesure.
Tels les carottages permettant de remonter le temps, la grille semblait décompter chaque épisode sans possibilité d’échappatoire. Gare à l'équipe qui aurait laissé un espace de plus de 20 centimètres entre la mention du début de la poussée et celle de l'heure de la naissance.

Pourtant, peu de femmes parvenaient à respecter le délai imposé. Nous aurions assisté à une farandole de forceps pour "efforts expulsifs inefficaces" sans le stratagème mis en place par les sages-femmes. Elles laissaient l’accouchement se dérouler à son rythme. Puis, une fois l’heure de naissance connue et dument notée sur le graphique, elles comptaient avec application 20 centimètres en arrière pour inscrire « début des efforts expulsifs ».

Souci louable du bien-être maternel qui a cependant conduit des myriades de futurs médecins à se persuader qu’une expulsion normale ne dure pas plus de 20 minutes.
Délai leur semblant parfaitement réaliste puisque confirmé à chaque staff…

23 novembre 2010

Second life

Une fresque colorée pare son dos de l’épaule gauche à la hanche opposée, immense tatouage réalisé il y a plusieurs années, bien avant qu’elle n’envisage d’avoir cet enfant.

Elle perd les eaux trois semaines avant le terme prévu, à la veille du rendez-vous fixé pour la consultation d’anesthésie.
Faute de contraction, son accouchement est déclenché. Son utérus travaille longtemps et douloureusement avant que la dilatation n’autorise, selon le protocole de la maternité, le recours à l’analgésie.

L’anesthésiste découvre la fresque. Il exprime alors son agacement, critique l’aberration d'avoir cédé à cette "mode" et glose abondamment sur l’inconscience féminine ; discours apparaissant bien long à celle qui attend que sa douleur soit apaisée.
Enfin, la péridurale est posée, sans difficulté aucune. Un espace de peau blanche a permis de piquer en évitant de traverser l’encre.

L’enfant nait quelques heures plus tard, paisiblement.

Sa mère conserve une secrète rancœur pour celui qui l’a longuement sermonnée avant de consentir à la soulager. Malaise diffus qu'un dernier épisode viendra involontairement désamorcer le jour de sa sortie.
Apparemment hanté par le vaste dessin gravé sur sa peau, l’anesthésiste repasse la voir pour condamner à nouveau cette pratique. Le mot tatouage vient ponctuer régulièrement son monologue.
Il s’en va enfin sur une dernière phrase « la prochaine fois, il faudrait éviter » en désignant son dos d’une main lasse.
Bien évidemment, c’est à la péridurale qu’il pensait. Mais comme jamais le terme n’a été prononcé, cela résonne comme la promesse d'une seconde vie lui permettant de présenter un épiderme vierge de tout pigment.

Et cette absurdité l’enchante.

20 novembre 2010

Feuilleton ...

Pour ceux qui ne suivraient pas les débats parlementaires avec passion et assiduité ( ! ), sachez que l'article 40 a finalement été adopté jeudi par la Commission mixte paritaire.
Il devrait donc être définitivement voté par l'Assemblée nationale puisqu'il avait passé le premier "tour".

L'expérimentation des maisons de naissance n'ayant pas grand chose à voir avec le financement de la sécurité sociale, reste à voir ensuite si un recours sera déposé devant le Conseil constitutionnel. Il peut être reproché à ce devenu fameux article 40 d'avoir été intégré au PLFSS.

Si tout va bien, nous n'aurons plus alors qu'à défendre, centimètre par centimètre, l'espace de liberté qui pourrait être conféré aux parents y accouchant et aux sages-femmes y exerçant.

Je dois dire qu'au vu des interventions de "nos" élus, je manque quelque peu d'optimisme...


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