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Dix lunes

1 mars 2012

Baignée

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La mise en route de son accouchement a été laborieuse... Dès le début, elle est assaillie par des contractions puissantes, en rangs serrés, l’obligeant à s’y consacrer totalement.

Hésitante, elle appelle la maternité. Au vu de sa description circonstanciée, la sage-femme lui conseille un bain. Elle s'y plonge docilement et marine une bonne heure. Une fois sortie de l’eau, les contractions sont toujours aussi présentes, elle préfère se rendre à la maternité pour faire le point.

L’accueil est chaleureux mais l’annonce décevante ; son col est à peine modifié et la sage-femme ne peut lui confirmer sa mise en travail.
Plutôt que de la "séquestrer", elle lui propose de rentrer chez elle et de ... prendre un bain afin de voir si cela va modifier le rythme et la force de ses contractions. Selon l'évolution, elle reviendra, ou pas.

Elle repart donc, sans oser objecter qu'elle vient juste de faire le test.
Nouveau bain prolongé, nouvelles contractions puissantes, nouveau départ à la maternité.
Elle y est accueillie par une autre sage-femme. La dilatation a peu évolué mais elle est déterminée à ne pas repartir. La journée qui vient de passer l’a fatiguée et elle appréhende la nuit à venir.
Elle reste donc et la sage-femme, souhaitant l’aider à passer ce premier cap… lui fait couler un bain.

Avant de poursuivre le récit d'un accouchement qui se passera très bien, mais de longues heures plus tard, elle s'interrompt pour lancer dans un éclat de rire « Je n’ai jamais été aussi propre ! »

 

©Photo

 

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26 février 2012

La forme sans le fond

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Un espace physiologique vient d'être inauguré à la maternité de Villefranche-de-Rouergue. La forme semble sympathique - quoiqu'un peu grise - pour ce que l'on peut en apercevoir dans ce bref reportage. Le commentaire du Pr Nisand (CHU de Strasbourg et non de Toulouse comme l'indique le sous-titre...) souligne que les femmes "préfèrent qu'on respecte la physiologie de leur accouchement".

J'aimerais que la médecine le préfère aussi...

Si la forme semble convenable, on est bien loin du fond ! En témoigne cet article de l'AFP où chaque mot mériterait une analyse de texte.

Le titre  "L'accouchement comme à la maison" est déjà un petit  - un gros - arrangement avec la réalité.

Nous avons cherché à créer une atmosphère de zénitude totale, pour donner le sentiment de materner la mère. Cette phrase sonne comme un aveu. Il ne s'agit pas de faire mais de donner l'impression.

- Lsalle physiologique de préparation à l'accouchement de Villefranche, la première en Midi-Pyrénées, correspond aux Maisons de naissanceLes espaces physiologiques sont sans nul doute une proposition intéressante mais n'ont rien à voir avec les maisons de naissance que l'on nous promet depuis ...1998.

Dans la salle aux murs gris clair, un investissement de 130.000 euros... Ca coûte cher de faire comme à la maison dans un hôpital !

- Le lit est assez grand pour que le mari soit allongé avec sa femme. C'est donc ainsi que la chef de service imagine un accouchement "naturel". 

L'accouchement lui-même se fait sur le lit, en position accroupie. Interprétation du journaliste ? L'accouchement en maternité ne pourrait se concevoir que normé ? 

Après l'accouchement, la petite Manon ne lui a pas été arrachée pour la pesée et les examens. Faut-il noircir la réalité des stuctures pour justifier les demandes aletrnatives ?

- Elle n'aurait pas voulu accoucher chez elle: En aucun cas je n'aurais souhaité mettre la vie de ma fille et la mienne en danger, il me fallait la sécurité d'un hôpital à côté. Opinion personnelle que l'on nous assène comme une évidence.

-Le Pr Israël Nisand est formel: Je suis contre les Maisons de naissance expérimentées en dehors des hôpitaux. Lors de l'élaboration du cahier des charges des MDN, les sages-femmes avaient pourtant accepté la proximité immédiate (qui ne correspond pas à la définition des MDN) afin d'obtenir le démarrage de l'expérimentation. Ce n'est pas l'éloignement qui inquiète certains de nos amis obstétriciens, mais notre autonomie...

- Sans compter que de nombreuses femmes ayant fait le choix d'un accouchement naturel, démédicalisé, sans intervention (injections, péridurale...) pour faire diminuer les souffrances, changent d'avis au moment des premières contractions: seules 3 à 4 % de ces futures mères vont jusqu'au bout de leur démarche, reconnaît Mme Bader.

C'est à la lecture de cette dernière phrase que ma colère a explosé.

Aménager de jolies salles ne sert à rien si les sages-femmes ne sont pas disponibles et désireuses d'accompagner les femmes autrement. Je m'en inquiétais il y a quelques mois. "La douleur et le stress se payent cash et le risque est de voir pulluler des statistiques démontrant l'inanité des ces équipements". 

Voilà, j'ai déjà raison et je m'en désole.

Les gens de mauvaise volonté retiendront que l'on a dépensé 130 000 € d'argent public pour satisfaire des femmes capricieuses changeant d'avis dès leurs premières contractions...

 

 

Edit de 11h 30 : on me glisse à l'oreille que cette maternité ne mérite pas de jugement hatif... Mon billet n'étant inspiré "que" par un article de presse, tout témoignage direct sera le bienvenu !


Edit de minuit : Témoignages reçus ! L'article de l'AFP ne semble pas du tout représentatif de la réalité de cette maternité. Loin d'une simple politique d'affichage, il existe une réelle volonté de Mme Bader, chef de service, comme de l'équipe de respecter les attentes des couples. Pour preuve, le nombre d'accouchements augmente de façon régulière et certains parents délaissent une maternité bien plus proche pour se rendre à Villefrance de Rouergue. Dont acte !

Reste ce mystérieux chiffre de 3 à 4% dont je continue à cherche la source (cette statistique serait une estimation "générale" ne concernant pas la maternité citée)


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21 février 2012

Résister

 

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Mes débuts ont été bercés par quelques lieux, quelques noms, symboles du combat pour l’accouchement respecté, Les Bluets et Les Lilas à Paris, mais aussi Pithiviers, Pertuis, Céret, Châteauroux, Rouen.

Pithiviers et Pertuis ne font plus parler d’eux, la maternité de Céret a disparu comme celle de Châteauroux*.
Les parisiens se battent pour survivre et faire perdurer les valeurs qu'ils défendent.
La mobilisation pour les Lilas semble avoir porté ses fruits ; aux Bluets, la bataille ne fait que commencer…

Comme souvent, la province fait moins parler d’elle que la capitale. Un peu excentré - la Haute Normandie, c’est pas central - le Belvédère a taillé sa route tranquillement. Mais là-bas aussi, la maternité est menacée, non pas de disparaitre mais de perdre son âme.

Depuis les années 70, l’équipe du Belvédère défend une certaine idée de la naissance, de l’accueil du nouveau-né - Leboyer publiait "Pour une naissance sans violence" en 1974- mais aussi de ses parents. Déjà, on accueillait les enfants avec respect et douceur, l'équipe privilégiait la proximité de la mère et de son nouveau-né.
Quelques décennies plus tard, les relations avec les couples sont toujours envisagées comme un partenariat respectueux. Accompagner, donner  l’espace et le temps nécessaire, proposer de multiples façon de se préparer, respecter la physiologie, se montrer vigilant plutôt qu’interventionniste…

L’équipe sait se questionner, se remettre en question, interroge ses façons de faire pour faire mieux.

Mais là-bas comme ailleurs la T2A fait son œuvre. Cette façon de financer les établissements en comptabilisant chaque acte est tout sauf favorable à une maternité qui tente justement d’éviter tout acte superflu. Un accouchement physiologique, c’est d’abord de la présence, de la confiance, du temps, (ce qui n’exclût en rien l’intervention médicale, mais au plus juste niveau, quand elle s’avère indispensable).

Comme aux Bluets, on leur a fait croire qu’ils devaient faire plus pour éviter le déficit ; plus de consultations, de préparations, d’accouchements, plus de femmes, plus de bébés. Mais avec le même personnel !
Quotidiennement, l’équipe s’épuise et souffre de ne pouvoir donner autant qu’elle le voudrait.

Certains nous affirment que les femmes ont changé. La péridurale est un incontournable et avec elle les protocoles s’invitent. L'uniformisation des naissances, ce serait la faute à l’époque…

D'autres savent l'attention qu'il faut porter à chaque femme pour voir éclore ses attentes, ses choix. L’équipe du Belvédère est de ceux là et le temps de cet accompagnement ciselé n'est pas pris en compte par la T2A.

Ils ont choisi de se battre, soutenus par des parents motivés, mesurant l’importance de l’enjeu. Non, la santé ne peut se gérer comme une entreprise ! Il ne s’agit pas de dilapider l’argent public mais de l'investir utilement. 

Bien accompagner la naissance d’un enfant est une exigence d'humanité.
Soutenons le Belvédère !


*Il y a toujours des maternités dans ces villes… pas les mêmes.

 

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Mardi 21 février (ce soir quoi !) à 23h10 sur France 2, documentaire à ne pas manquer : "La naissance, une révolution".



17 février 2012

Fragile

 

2409012938_c6729e3679_zTatoués, percés, crêtés, ils ne passent pas inaperçus. 

Ils attendent leur premier enfant avec bonheur, s'émeuvent des premières sensations, imaginent les mois à venir, s'interrogent sur leur compétence parentale. Habituelles réflexions partagées par de nombreux couples.  

Pourtant... réactions un peu vives, critiques à peine voilées, au fil des mots se révèle leur totale défiance vis à vis du monde médical.  

L’un comme l’autre ont une santé fragile, l’un comme l’autre se heurtent à un système de soin qu'ils ressentent comme brutal. Ils dénoncent une médecine indifférente et riche en préjugés.

Si elle a cessé de fumer depuis le début de sa grossesse, lui n’y parvient pas. Ce serait pourtant nécessaire. Un asthme sévère l’amène régulièrement aux urgences. Une fois soulagé, il en ressort avec un traitement, les consignes d'un suivi régulier et d'arrêt du tabac. Tous conseils qu'il s'empresse de ne pas suivre.

Le dernier pneumologue, consulté il y a plusieurs années, lui aurait annoncé qu'il mourrait trop vite de l’action conjuguée de son asthme et de son tabagisme… Provocation volontaire pour le faire réagir et le mettre en face de choix essentiels ? Lui l’a entendu comme une fin de non-recevoir.

Du pré au post natal, notre chemin commun durera une année. J'ai très naïvement espéré le convaincre de mieux se soigner, cherchant le spécialiste qui l'accueillerait sans jugement abrupt, espérant que l'accompagnement respectueux de la grossesse restaurerait sa confiance dans le milieu médical.

Peine perdue.

Il néglige tout suivi, consentant à se rendre aux urgences lorsqu'une crise plus grave le met à bout de souffle...
Il n'a pas trente ans et ne peut monter des étages sans faire étape à chaque pallier.

 

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12 février 2012

Limites de territoires

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C'est fatiguant à la fin... Après certains syndicats médicaux, ce sont maintenant des kinésithérapeutes qui nous prennent pour cible.

A l'origine de leur ire, une initiative de notre Conseil de l'ordre qui défend la possibilité pour les sages-femmes d'assurer la rééducation périnéale de femmes sans enfant*. 

De mon point de vue, cette revendication n'est pas une priorité. Ma seule réserve concerne les patientes vivant à distance de tout cabinet de kiné mais à proximité d'un cabinet de sage-femme. Eviter dans ce cas un long déplacement justifierait une dérogation (parfois déjà accordée par l'assurance maladie). Pour le reste, nous avons bien assez à faire avec les accouchées.

Je n'avais donc pas souhaité réagir au mécontentement compréhensible des kinés avant ce qui m'apparait comme une nouvelle attaque. Ainsi, les sages-femmes "phagocytent la rééducation du post partum" ?!  

Comme pour le suivi de la grossesse, je revendique le libre choix des femmes pour leur rééducation postnatale. C'est à elles de décider vers quel praticien elles souhaitent se tourner. Je déplore donc avec les kinés que la nomenclature les exclue de cette rééducation dans les trois mois suivant une naissance. Solidaire encore, je soutiens une cotation similaire de nos actes, en soulignant cependant que l'on ne peut comparer la rémunération d'un praticien se consacrant exclusivement à son patient à celle d'un autre prenant en charge plusieurs personnes simultanément (n'y voyez aucune inflexion corporatiste, ce bémol concerne nos deux professions... à des degrés différents.)

Mais nos amis viennent de se tromper de combat... Dans un courrier adressé à la caisse de Paris, le SMKRP écrit "En effet, il semblerait que certaines caisses primaires d'assurance-maladie remboursent des actes de rééducation fonctionnelle prescris (sic) par les sages-femmes. Cette information laisserait à penser que les sages-femmes prescrivent une rééducation qui n'entre pas dans leur domaine de  compétence".

Mauvais argument ! Lorsque nous prescrivons une rééducation périnéale, nous sommes à la fois aptes à la prescrire et à la réaliser. Il serait pourtant parfaitement abusif et irrespectueux des femmes comme de nos collègues kinés d'exiger que cette rééducation se fasse avec une sage-femme. 

A l'inverse, nous sommes  en conflit avec l'assurance maladie qui refuse de prendre en charge la rééducation abdominale postnatale si l'ordonnance est signée par une sage-femme et non par un médecin (cf cette action syndicale). Si la réalisation de cet acte n'est pas de notre compétence, sa prescription l'est et le soutien des kinésithérapeutes serait bienvenu.

Les sages-femmes assurent de plus en plus de suivi de grossesse et voient donc des patientes consultant pour sciatalgies, lombalgies... Le plus souvent, il s'agit d'une symptomatologie banale chez la femme enceinte, banale ne signifiant pas pour autant négligeable. Mais quelle que soit la situation, nous ne pouvons actuellement prescrire de traitements de kinésithérapie et sommes amenées à rediriger ces patientes vers un médecin. Cette double consultation est absurde ...

En dénonçant nos prescriptions, le SMKRP dénie aux femmes la possibilité de choisir leur praticien, leur complique l'accès à des soins remboursés parce qu'elles ont eu l'audace de ne pas s'adresser à un médecin, contribue à des dépenses superflues pour un système de santé déjà malmené. 

Et il énerve un tantinet les sages-femmes...

 

 * Les sages-femmes ne peuvent assurer la rééducation périnéale que chez les femmes ayant - un jour même lointain- accouché...  Cette restriction semble un peu dérisoire ; à 80 ans, les problèmes de prolapsus ou d'incontinence sont-ils à mettre sur le compte d'un accouchement vieux d'un demi-siècle ou de l'âge ?

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7 février 2012

Assimilé

 

5687574949_dc775e7b48_zElle est sage-femme, il exerce un métier très éloigné des contingences médicales et féminines. Ils habitent dans un petit bourg de province, quelques milliers d'âmes, une église, une école, un marché... Résidant là-bas depuis plusieurs années, tous les deux très actifs dans le réseau associatif, leurs enfants scolarisés dans la commune, ils connaissent tout le monde et tout le monde les connait.

Après avoir fait de nombreux remplacements dans les villes environnantes, elle décide de s'intaller comme sage-femme libérale dans son village. Déjà appréciée en tant que voisine, les femmes s'adressent à elle en confiance et très rapidement son cabinet ne désemplit plus.

En ville, elle retrouvait son anonymat dès la fin de ses consultations. Ici, c'est une toute autre histoire. Elle croise avec plaisir ses "patientes" à la sortie de l'école, prend des nouvelles du dernier-né, s'habitue à donner quelques conseils au hasard d'une rencontre à la boulangerie...

Lui découvre un nouveau statut. Identifié comme le "mari de la sage-femme", il se retrouve à recevoir certaines confidences dont il se serait bien passé. La dernière en date l'a laissé pantois. Il raconte mi amusé, mi gêné, comment cette dame un peu âgée l'a alpagué au marché devant l'étal des primeurs pour lui annoncer "Faudra que je vienne voir vot' dame, parce que quand j' tousse, j' fais des gouttes dans ma culotte."


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3 février 2012

Cinéma

 

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Magazine de la santé, mercredi 1er février. Reportage sur le prado (dixième minute). Il débute par des images du passage à domicile de Julien, sage-femme libéral*, qui expose brièvement le contenu de ses visites.  Une conseillère de l'assurance maladie rappelle ensuite que cette possibilité existait déjà mais que "les femmes n'en étaient pas correctement informées".

L'intervention suivante est ainsi annoncée : " Le prado fait pourtant grincer des dents, en particuliers les médecins totalement exclus des négociations".

Voici le texte intégral - je ne voudrais pas le dénaturer en le coupant - de l'intervention du Dr Jean Paul Hamon, président de la FMF (Fédération des médecins de France). 
" Il faut au moins qu'il y ait une auxiliaire de puériculture, il faut au moins qu'il y ait une visite de médecin qui puisse examiner la mère, il faut au moins qu'il y ait une visite de médecin ou pédiatre ou d'une personne qui a l'habitude des enfants en bas âge pour prendre en charge cet enfant. Il faut arrêter, il faut arrêter de penser que la sécurité sociale peut faire des économies sur tout et n'importe quoi sans consulter personne."

Pour en saisir tout le sel, il faut imaginer ces quelques phrases proférées avec le ton immensément las de celui qui répète les mêmes évidences depuis des années... 

Voilà donc un monsieur qui déplore de ne pas avoir été consulté pour la mise en route d'une prise en charge qui ne le concerne pas. Au risque de me répéter lourdement, les femmes sortent de maternité comme elles le faisaient avant ce programme mais il leur est proposé d'accompagner leur retour par deux visites (ou plus si nécessaire) de sage-femme.

Le Dr Hamon en appelle à l'auxiliaire de puériculture pour - j'imagine - prendre  soin du bébé, au médecin traitant pour l'examen de la mère et au pédiatre -ou "à toute personne habituée aux enfants en bas âge" (sic) - pour examiner l'enfant.

J'ai une bonne nouvelle pour le Dr Hamon, une sage-femme fait tout cela à la fois, peut y consacrer plus de temps et coûtera 30% moins cher à la collectivité**.
Je serais moins acide si je pensais que derrière son intervention se cachait un réel souci des femmes et des enfants. Mais le ton et les "arguments" employés (ainsi que les propos tenus par le même Dr Hamon en décembre 2011 ) démontrent le contraire.

Par ailleurs, avant que le post partum immédiat ne devienne un enjeu de territoire, qui a vu médecin généraliste ou pédiatre envisager de se déplacer deux fois à domicile en quelques jours pour une femme ou un enfant sans pathologie avérée ? Loin de moi l'idée de le leur reprocher, ce n'est pas leur rôle. Et c'est bien là tout l'intérêt de la collaboration entre médecins et sages-femmes qui peuvent proposer des approches parallèles et complémentaires.
 
Monsieur Hamon, les sages-femmes n'exercent pas sous tutelle.
Respectez notre profession, reconnaissez nos compétences, notre autonomie d'exercice, de diagnostic, de prescription... Nous ferons alors du bon travail ensemble.

 

*je remarque encore une fois la sur-réprésentation de mes collègues masculins dans les reportages.

**Visite médecin = 23 € +10 € de déplacement, consultation pédiatrique = 28 € +10 € (sans compter l'auxiliaire de puériculture, ce métier n'existant pas en libéral) soit un total de 71 €.
La visite d'une sage-femme libérale coûtera à l'assurance maladie 42.40€ + 3.81€ de déplacement soit 46.21€.

NB : le CNGOF a publié un communiqué plus modéré critiquant l'intervention du conseiller de l'assurance maladie. Il suggère d'autres utilisations des budgets, comme la création de TISF. Sur ces deux points, il rejoint la position des sages-femmes. Par contre, il égratigne les libérales et s'offusque de la publicité donnée à notre profession à travers cette nouvelle organisation des soins...

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31 janvier 2012

Spontanée

 

4690504255_b1a1a09879_zSon accent chante mais son regard est voilé de larmes… Elle s’inquiète de tout, échafaude de nombreuses et hasardeuses hypothèses, soumet sa vie à de multiples rituels censés porter chance à son futur enfant. Elle s’angoisse du trop ou du trop peu de ses mouvements, de son ventre très rond mais pas encore assez, des aliments quelle mange et de ceux qu’elle boude, des douleurs ressenties et des risques de leur traitement, de ses nuits d'insomnie ou de son sommeil de plomb...

Et plus encore elle s’angoisse ce que son angoisse fait vivre ainsi à son futur bébé.

Ces questionnements incessants ne sont que la partie émergée d’une histoire complexe dont elle livre quelques bribes lors de notre première rencontre. Je sais déjà qu’il me faudra la guider vers d’autres soignants et d’autres compétences pour l’aider à sortir de cette nasse de symptômes et pensées qui l’envahissent et l’encerclent.

Pour le moment, il me faut bien faire quelque chose pour qu’elle se sente accompagnée, pour qu’elle puisse déposer un peu de son si lourd fardeau.

Alors, je reprends avec elle l’ensemble des symptômes évoqués, tentant pour chacun de valoriser l’extrême attention qu’elle porte à son bébé.

Au milieu d’une phrase, elle me coupe et s’exclame « Ah ça me fait du bien ce que vous me dites ! », puis elle se lève avec élan et, se penchant vers moi, me claque une grosse bise sur la joue.

 

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26 janvier 2012

L'académie veille

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Me voilà encore à défendre le prado*… Pas tant pour ce qu'il est - nous le faisions déjà - mais pour dénoncer la manipulation des idées…

L’académie de médecine se préoccupe du sort des femmes et des nouveau-nés. Louable souci ! Mais nos académiciens sont au mieux mal informés, au pire de mauvaise foi.

Si les termes de « sortie précoce » sont largement utilisés par des médias méconnaissant la réalité hospitalière, ils étonnent dans la bouche d’experts de la médecine. Le programme expérimenté ne consiste pas à faire sortir les femmes plus rapidement de la maternité mais à leur proposer, après une sortie "normale"  un suivi prolongé qui n’était pas encore formalisé. Le prado permettra que chaque jeune mère soit informée de cette possibilité,(auparavant, les femmes qui bénéficiaient de cet accompagnement étaient principalement celles qui, suivies pendant leur grossesse par une sage-femme libérale, faisaient de nouveau appel à celle-ci à leur retour à domicile). 

Mais les sous-entendus parsemant le texte me laissent penser que la dénomination erronée ne relève pas du défaut d'information ...

Pourquoi insister sur la "décision médicale"  - en taclant dans le même temps celles qui décideraient d'elles même une sortie rapide - alors que la décision de sortie est explicitement précisée comme du ressort de l’équipe hospitalière.

Pourquoi souligner la nécessité d’une "parfaite connexion entre les maternités et les sages-femmes libérales" alors que nul ne se préoccupait jusqu'à présent de l'absence de suivi au retour à la maison. 

Pourquoi réclamer une sécurité équivalente à celle proposée en maternité qui laisse entendre que le retour à domicile met en danger la santé des femmes et des nouveau-nés ?

Pourquoi préciser le nombre de visites nécessaires qui suggère que les sages-femmes ne sont pas en capacité d’en décider avec les parents.

Pourquoi insister sur une disponibilité de la sage-femme "à tout moment" alors qu'il s’agit de mères et d’enfants sans souci particulier (c'est dans la définition même du prado) et que plus aucun médecin de ville, quel que soit l'état de santé de ses patients, n'assure cette permanence. 

Pourquoi évoquer "l’accompagnement attentif" de l’allaitement maternel alors que ce rôle est assuré au quotidien par les sages-femmes.

Et pourquoi conclure sur d’éventuels retards diagnostiques si ce n’est pour faire frémir les familles - femmes et bébés seraient-ils des bombes à retardement - et suggérer en quelques mots que les sages-femmes sont incompétentes.

 

En clair, ce communiqué n'est-il pas au service des médecins plutôt que des"patients", certains parmi les premiers s'inquiétant de voir les sages-femmes prendre enfin une place plus visible dans la périnatalité française ? 

 

 

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 * présentation du prado

22 janvier 2012

Déplacée

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Au téléphone, une jeune femme inconnue souhaite une consultation.

Quelques questions pour décrypter les motifs de sa demande. Elle vient d'accoucher de son premier enfant. Son bébé a deux semaines, va bien, elle aussi. A sa sortie de maternité, "on" lui a cependant demandé de faire surveiller son épisiotomie.

Elle ne sait pas ce qui se passe, n'a pas mal, ne pense pas avoir eu de problème particulier mais "on" lui a conseillé de contacter une sage-femme.

Nous ferons donc la consultation demandée.

Puis elle précise "faudra venir chez moi ".

-"Vous avez des difficultés pour vous déplacer ?
- Non
- Vous n’avez pas de voiture ? (les transports en commun sont calamiteux dans ma ville)
- Si
- Pourquoi avez vous besoin d'une visite à domicile ?
- Parce que c’est noté sur l’ordonnance..." *

Petit exposé didactique pour expliquer que venir au cabinet nous permet de faire un examen dans de meilleures conditions, que le rendez-vous est plus facile à caser dans notre emploi du temps et que de plus cela fait gagner quelques sous à la sécu … Je sens bien que je la contrarie mais j'insiste.

Elle se résout dans un -très gros-  soupir à faire l'apparent -très gros - effort de se déplacer.

Reste à trouver le moment du rendez vous. Je propose un créneau le surlendemain.
Ca ne va pas être possible, ce jour là, elle rend visite à sa famille.


* Note à mes collègues de maternité : nul besoin de prescription pour une consultation de sage-femme !


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